La satisfaction des lauréats et de leurs parents, voire celle des enseignants sans doute heureux et non sans raison d’avoir accompli leur devoir, n’occulte pas pour autant les questions de fond que suscite cette situation. Sans prétention à l’exhaustivité, les questions affluent relatives à la qualité du niveau académique des élèves dont la continuelle tendance baissière est dénoncée avec pertinence, y compris par nombre d’enseignants eux-mêmes, comme celles portant sur la valeur de la certification des études, voire de la formation de l’Homme. Dans un contexte où la moyenne ne sert plus à grand-chose, la certification n’est plus la preuve que son détenteur a passé avec succès le cursus d’études et maîtrise un certain nombre de connaissances lui permettant d’assumer son rôle dans la société. Le problème global ainsi posé ne se ramène pas bien évidemment à l’acquisition d’un parchemin de fin d’études primaires et de succès au concours d’entrée en sixième. L’enseignement, à l’école primaire, vise déjà à poser les jalons de la formation de l’Homme qui doit apprendre à s’insérer dans la vie compte tenu de son environnement. Comment apprendre à s’insérer dans la vie si l’élève accède en sixième par la voie de la facilité et du rabais, sans savoir ni écrire ni calculer correctement, sans savoir s’exprimer avec fluidité ni dans sa langue maternelle, ni dans au moins une des langues officielles ? Ce n’est pas une mince affaire car les enjeux vont bien au-delà de l’apprentissage structuré de la lecture et de l’écriture, de la maîtrise de l’orthographe, de la grammaire, du calcul, etc. Mais il faut bien passer par là, comme le souligne pertinemment un proverbe pédagogique de la Rome antique : on parvient à de grandes choses à travers de petites choses (ad augusta per angusta).
L’obligation de l’école primaire pour tous les jeunes Camerounais, facilitée par la mesure de gratuité de l’école primaire publique décidée par l’Etat, n’est certainement pas exclusive de la qualité de l’enseignement et de la formation. Si la décision d’éviter les redoublements voire les échecs et les exclusions au primaire en vient à faire le lit de la médiocrité et du nivellement inacceptable de l’enseignement par le bas, alors s’impose une réflexion profonde sur sa qualité en vue d’une formation solide dès la base.