Décidément, la controverse au sein de l’opinion publique nationale sur
les prétendues velléités du gouvernement de vouloir porter atteinte à
l’indépendance de Elecam est loin de s’estomper au lendemain de
l’adoption par l’Assemblée nationale
au cours de sa première session
ordinaire de l’année de certaines modifications de la loi du 29
décembre 2006 portant création de cette structure indépendante chargée
désormais de la gestion du processus électoral dans notre pays. Selon
le gouvernement, le réaménagement opéré s’inscrit dans le sens de la
poursuite de l’amélioration de notre système électoral dans la logique
sans cesse dynamique du président Paul Biya de doter, au bout du
compte, le Cameroun « d’un appareil électoral qui rendra incontestables
les résultats des prochains scrutins ». Un engagement réaffirmé au
peuple camerounais par le Chef de l’Etat lors de son message à la
nation le 31 décembre dernier.
A contrario, l’opposition (partis politiques et société
civile) à travers leurs multiples sorties dans les médias nationaux,
voit dans ces réaménagements un retour en force de l’administration,
tant décriée pour sa partialité lors des différents scrutins
pluralistes que notre pays a connus depuis le retour au multipartisme
en décembre 1990.
De quoi s’agit-il en réalité ? Les modifications adoptées par
l’Assemblée nationale réintègrent notamment les commissions électorales
prévues par les lois antérieures et consacrent le principe de la
collaboration et des appuis que les administrations de l’Etat sont
dorénavant tenues d’apporter à Elections Cameroon dans
l’accomplissement de ses missions en matière électorale.
A la vérité n’est-il pas de la responsabilité de tout Etat de droit de
veiller au bon fonctionnement des structures, indépendantes, privées ou
pas qui exercent des missions de salut collectif dans le respect de
l’ordre public et de la sécurité de tous ses citoyens ? Certes sur le
plan politique, il est de bonne guerre, pour les acteurs et
professionnels de la scène de faire des surenchères bien ciblées,
surtout en prévision à des échéances électorales importantes voire
déterminantes pour la vie de la nation comme les premières sénatoriales
à venir et particulièrement le prochain scrutin à la magistrature
suprême du pays. Et tout à fait naturellement, la moindre volonté de
retouche d’un texte de loi lié directement à ces échéances peut
susciter diverses lectures et créer une suspicion malsaine et nocive
pour la bonne entente sociale. Il aurait sans doute été utile qu’en
amont qu’une bonne campagne d’explication soit menée pour expliquer le
bien-fondé des réaménagements engagés afin de baliser dans le meilleur
des cas possibles un champ politique qui est toujours très glissant. Un
champ où il est de bon ton de faire feu de tout bois, pourvu que face à
l’opinion publique et à l’adversaire on marque des points. Tout est
prétexte pour faire mousser le débat sur la scène nationale. Cependant
dans ce match de ping-pong à géométrie exponentielle, une donnée
fondamentale de la loi du 29 décembre 2006 demeure immuable. Dans son
article 1 (2), Elections Cameroon « un organisme indépendant chargé de
l’organisation, de la gestion et de la supervision de l’ensemble du
processus électoral et référendaire ». C’est clair et sans équivoque.
Pourquoi ne pas citer ce dicton célèbre qui dispose que « les
structures ne valent que par la nature des hommes qui les animent ».
Les membres de cette structure ont prêté serment devant la justice
camerounaise, qui est selon la formule consacrée, « rendue au nom du
peuple ». Leur responsabilité historique n’en est-elle pas plus grande
? En un mot comme en mille, c’est au pied du mur que le peuple jugera
son maçon.