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Dossier de la Rédaction

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Paradoxe camerounais

Il existe une école publique, quelque part dans la région de l’Est, qui ne dispose que de trois salles de classe ; un centre de santé, dans la région du Nord-ouest, qui ne dispose pas des médicaments de base ; un poste agricole, dans la région de l’Extrême-nord, dont le chef de poste attend un moyen de locomotion pour parcourir son territoire et encadrer les paysans ; une piste rurale quelque part dans le Centre qui attend son entretien depuis des années. Il ne s’agit point ici de grandes infrastructures (autoroutes, hôpitaux de référence, projets de développement agricole, etc.) mais de ces petites réalisations qui touchent et changent le quotidien des populations. Des populations qui finissent par se sentir abandonnées par les pouvoirs publics.

Les chiffres donnés par le ministre des Finances, Essimi Menye, sur la réalisation du budget 2009 apportent un éclairage sur la consommation du budget d’investissement public. A côté du budget de fonctionnement consommé à hauteur de 92,9% (1 260 742 979 698 francs sur des dotations de 1 359 800 000 de francs), celui des investissements affiche un état de consommation de 77,2% (463 387 161 348 francs sur des dotations de 597 000 000 000 francs). Il y a là un paradoxe s’agissant de budgets qui, assez souvent, sont gérés par les mêmes structures. En clair, on achète facilement des cartons de stylos, des rames de papier, des cartouches d’encre pour photocopieurs alors qu’on aurait de la peine à faire bouger le dossier de construction d’une salle de classe ou de l’acquisition d’un moyen de locomotion pour un agent de terrain.

Et les explications fournies par le ministre des Finances donnent encore plus à réfléchir. Trois « problèmes structurels » sont évoqués pour expliquer ce paradoxe : la lourdeur des procédures de passation des marchés ; le montage approximatif de certains dossiers de projets d’investissement ; les délais plus longs que prennent les études dans la réalisation des projets. Des explications certes pertinentes mais qui n’en interpellent pas moins la collectivité sur sa responsabilité.

Les procédures des marchés, qui les a mises en place ? Dans quel but ? Les plus hautes autorités de l’Etat ont eu le souci de codifier l’attribution des marchés publics. Une codification indispensable à l’heure de la transparence et de la bonne gouvernance. C’est dire, de façon claire, que ces procédures devaient permettre de franchir un palier en termes de qualité. Elles ne devaient en aucun cas éloigner de l’atteinte de l’objectif. Ainsi des routes dont les procédures de passation des marchés sont si longues que l’aboutissement coïncide très souvent avec la saison de pluies.

Le montage approximatif des projets ? Sans être excessif, on pourrait dire ici que le miroir nous renvoie notre propre image. Sommes-nous capables de monter des projets ? Les bonnes personnes sont-elles mises aux bonnes positions ? A la vérité, une autre explication pourrait bien compléter celles données par le ministre des Finances. C’est la corruption qui infeste le Cameroun.

Des réseaux de corruption ont pris le contrôle de certaines administrations publiques. Des fournisseurs et prestataires, en véritables rapaces, écument les couloirs et cabinets des décideurs. Ils jonglent avec les bons de commande et se gavent de lettre-commande, pour des services plus souvent fictifs mais validés et payés.

Pendant longtemps, le budget d’investissement public a connu lui aussi les mêmes travers, servant de vache à lait à ces prédateurs. Mais, depuis quelques années, de nombreux regards « suspicieux » (brigades de contrôle, Contrôle supérieur de l’Etat, Chambre des Comptes, etc.) pèsent sur les acteurs de la chaîne du budget d’investissement. Des contrôles d’exécution physique se sont multipliés. Ces contrôles ont permis de voir que des salles de classe construites sur du papier n’existent pas dans la réalité ; que des routes rurales entretenues sur du papier n’ont pourtant pas vu passer un engin. Et on pourrait ainsi multiplier les exemples.

Un premier pas positif a donc été franchi dans la bonne direction : mettre fin à l’hémorragie. Le deuxième pas attendu est l’incitation à la saine consommation des crédits du budget d’investissement.

Le dernier pas attendu est celui de l’implémentation à large échelle et définitive du concept de qualité de la dépense dans toute la chaîne du budget de fonctionnement. On sortira alors du paradoxe qui fait que nos administrations consomment tous leurs crédits mais manquent souvent de papier au point de se tourner vers les usagers pour les « aider ».

 

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