Stabilité politique, amélioration du niveau de vie et réconciliation entre ethnies sont autant de chantiers à engager.
Le premier président démocratiquement élu en Guinée a fort à faire. Car il hérite d’un pays qui, jusqu’ici, n’a connu depuis l’indépendance en 1958 que des régimes dictatoriaux, civils ou militaires, avec une tradition de coup d’Etat, de mutinerie et de répression sanglante bien ancrée. Celui qui sera déclaré élu - Alpha Condé ou Cellou Dalein Diallo- après les résultats définitifs que la Cour suprême va proclamer une fois les recours examinés, devra s’attaquer au chantier de la réforme de l’armée afin de construire une armée républicaine.
Alpha Condé, déclaré provisoirement vainqueur du second tour de la présidentielle par la Commission électorale nationale indépendante (Céni), déclare à ce sujet que « 'armée est un vrai problème. […] Près de 30 % du budget [affecté à l'armée], c'est trop. […] Bien sûr, il faudra envoyer beaucoup de militaires à la retraite ». Un agent des renseignements, cité par Jeune Afrique.com, renchérit que l’autre danger du nouveau pouvoir viendra des militaires. « Une partie de l’armée, habituée à profiter de sa position pour racketter et organiser des trafics, est réticente. À la moindre occasion, elle pourrait reprendre le pouvoir », confie-t-il. Ce risque, le général Sékouba Konaté, à la tête de la transition, en est conscient. Au cours de ces derniers mois, il a pris des mesures pour récupérer les armes en circulation, démanteler des camps d’entraînements illégaux, promouvoir des militaires longtemps mis à l’écart et engager la construction de casernes.
Autre défi à relever : la relance de l’économie guinéenne aujourd’hui exsangue. Il est question de créer un environnement favorable à la transformation sur place des riches matières premières du sol et du sous-sol (bauxite, or, diamant, cacao, café) dont regorge la Guinée, attirer les investisseurs étrangers pour déclencher une dynamique de croissance élevée susceptible de réduire la pauvreté de masse. Premier exportateur mondial de bauxite, la Guinée vient d’être classée pays à développement humain faible (156e sur 169) dans le rapport 2010 du PNUD.
Enfin, il faudra créer la cohésion sociale. Car les joutes politiques ont provoqué des tensions ethniques lors des élections avec notamment des bagarres entre les communautés peules et malinkés. Cellou Dalein Diallo a même accusé mardi dernier les forces de l'ordre d' « assassinats » et de « brutalité sauvage » envers ses partisans et des membres de son ethnie peule, affirmant « ne pas pouvoir compter sur le Premier ministre et le ministre de la Sécurité qui sont derrière cette répression ». Reste à espérer que le gouvernement d’union nationale qu’appelle de ses vœux le candidat actuellement victorieux serve de catalyseur à la réconciliation entre Guinéens.
