Vainqueur de la première élection libre et démocratique organisée en Guinée depuis l’indépendance en 1958, Alpha Condé, opposant historique à tous les régimes qui se sont succédés jusque-là à Conakry, a la lourde et exaltante mission d’écrire en lettres d’or une nouvelle page de l’histoire de ce pays pauvre d’Afrique de l’Ouest. Alors qu’il attend encore d’être investi dans ses nouvelles fonctions de président de la République - la date de la cérémonie de prestation de serment n’est pasfixée- Alpha Condé a opté d’annoncer les couleurs de son mandat, en souhaitant, le week-end dernier, la mise en place d'une "conférence vérité-réconciliation afin que les Guinéens se disent les vérités" sur les crimes commis tout au long de l'histoire de la Guinée indépendante. Ceci rappelle la politique de l’ex-président sud-africain,Nelson Mandela, son « modèle », après la chute de l'apartheid. M. Condé dit avoir insisté pendant sa campagne "sur la notion de pardon, parce que nous savons que notre pays a subi beaucoup d’épreuves" depuis l'année de son indépendance. "Il y a eu beaucoup de rancoeurs et le pays ne peut pas se développer sur des rancoeurs", a-t-il déclaré à l'issue d'une rencontre avec les dirigeants du Conseil national de transition, ajoutant: "J'espère qu’avec l’aide des religieux, nous allons organiser une conférence vérité-réconciliation afin que les Guinéens se disent les vérités". "Il ne s’agit pas de faire des règlements de comptes, mais qu’on échange seulement, qu’on se dise des vérités et qu’on assume notre histoire", a ajouté M. Condé qui a souhaité également lutter contre "l'impunité". "Il est nécessaire, sans qu’on fasse de chasse aux sorcières, qu’on mette quand même fin à l’impunité pour que ceux qui viennent ne recommencent pas la même chose", a-t-il affirmé. Le nouveau président a par ailleurs annoncé quelques-unes des décisions fortes qu'il compte prendre sans tarder : la gratuité de l'hôpital pour « les femmes enceintes et les nourrices » et la suppression de l'impôt de capitation « qui pèse sur les paysans inutilement ». Lui tient aussi à cœur, la réforme de l'armée et du secteur agricole, ce dernier représentant pour Alpha Condé le plus grand scandale guinéen.Sur le gouvernement d'union nationale, qu’il s’était engagé à mettre en place une fois élu, il a apporté des précisions qui relativisent sa politique de main tendue vis-à-vis du camp de Cellou Dalein Diallo, son adversaire malheureux au second tour de la présidentielle. « Il ne faut pas confondre gouvernement d'union nationale et gouvernement des partis : il ne s'agit pas d'un gouvernement d'alliance de partis », a-t-il indiqué. « Quand je dis gouvernement d'union nationale, ça veut dire que toutes les composantes de la Guinée doivent se retrouver dans ce gouvernement. » Et le nouveau président de citer « les composantes régionales ou les forces vives, que ce soient les partis, les syndicats ou la société civile ».