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Dossier de la Rédaction

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« 90% du patrimoine archéologique africain est en Europe » [interview]

Les explications de Samuel Sidibé, archéologue, directeur du Musée national du Mali.


Le trafic illicite des biens culturels doit durer depuis longtemps maintenant. A partir de quand est-il devenu préoccupant ?

Ce trafic a toujours été un problème. Pendant l’époque coloniale, l’Afrique a été considérablement dépouillée de son patrimoine, à travers les saisies guerrières, à travers les missions ethnologiques (ou scientifiques si vous préférez). Mais à partir des années 1960, un marché important s’est également développé. Il y avait des commerçants circulant partout en Afrique pour acheter des objets à vil prix, objets qu’ils revendaient en Europe. Je crois que c’est à partir des années 1970 que les Etats africains ont commencé à réfléchir vraiment à la question. Ils ont donc œuvré, avec l’Unesco, à mettre en place la Convention de 1970, visant à empêcher l’exportation illicite du patrimoine, et à mettre en place une coopération internationale pour préserver ce patrimoine. Le phénomène a connu une ampleur importante à l’époque coloniale, mais il a continué à se développer pour plusieurs raisons.


Lesquelles ?

D’abord, les Etats n’ont pas été suffisamment vigilants, en mettant en place des musées, en formant adéquatement des personnels, et en dégageant des moyens pour la conservation du patrimoine sur place, et pour contrer le phénomène du trafic illicite.


Qui alimente ce trafic aujourd’hui ?

Le trafic naît, d’abord, d’une forte demande à l’extérieur. Vous avez des collectionneurs privés, des musées dans une certaine mesure, qui sont intéressés par ce patrimoine, ces objets africains, qui ont acquis, au fil du temps, le statut d’objets d’art. Lesquels peuvent valoir aujourd’hui, sur le marché international, des sommes considérables. Je vous prends le cas d’un objet malien qui a été vendu à Bamako à cinq millions F Cfa, mais a été proposé à environ 40 millions dès qu’il est arrivé en Europe. Il y a une vraie demande.


Quels sont les pays « consommateurs » ?

Ce sont toujours les mêmes, les pays du Nord : France, Belgique, Etats-Unis, etc. Des pays riches où beaucoup (marchands, musées, collectionneurs privés) sont intéressés par les objets d’art africains. Cela se fait au détriment de l’Afrique. Aujourd’hui, on évalue que 90% du patrimoine connu en Afrique est déjà en Europe. Si on ne fait rien pour que ce phénomène s’arrête, on sera dépouillé de tout. Il faut que les Etats africains – s’ils sont intéressés par la sauvegarde de notre mémoire – mettent en place aujourd’hui des institutions véritablement opérationnelles. Les musées en Afrique de nos jours manquent encore de trop de choses.

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