L’ouvrage, « Histoire des hommes et de l’indépendance du Cameroun 1950-1970 » est un recueil de portraits de personnalités ayant marqué le pays à cette époque.
En écrivant « Histoire des hommes et de l’indépendance du Cameroun 1950-1970 », Richard Keuko a voulu réparer une anomalie, pallier la méconnaissance de l’histoire par les jeunes générations. Vaincre cette sorte d’amnésie chronique ou entretenue. L’auteur estime que l’avenir du Cameroun s’est joué entre 1950 et 1970. Et pour mieux comprendre l’évolution et les tendances politiques de l’heure, effectuons un flash-back salvateur. Richard Keuko a fait le pari osé de prendre le lecteur par la main, et de l’entraîner dans les rues chaudes et bouillantes de Douala pendant la période d’indépendance, dans le maquis de l’Ouest et de la Sanaga-Maritime, où la rébellion, terrée, traquée, « devait être matée » ou encore dans les allées froides du pouvoir à Yaoundé.
L’auteur n’oublie pas les détails croustillants voire ironiques qui ont changé le cours de l’histoire. Exemple, p. 22 : « Poussés par le haut-commissaire au plus fort de la crise avec le Premier ministre en 1958, Ahmadou Ahidjo et ses partisans finissent par signer l’acte de décès du gouvernement Mbida, qu’ils avaient contribué à mettre sur pied quelques mois auparavant. Bien que terrorisés à l’idée de trahir l’homme qu’ils avaient soutenu jusque-là, l’attrait du pouvoir que leur offre Jean-Paul Ramadier a fini par prendre le dessus sur leur réticence. Ce dernier a promis le poste de Mbida à Ahidjo, à condition que celui-ci l’aide à le renverser », écrit Richard Keuko. Les révélations abondent dans l’ouvrage, qui, comme l’indique le préfacier Hubert Mono Ndjana, s’inscrit tant « dans le sens du « connais-toi toi-même », que dans la perspective symbolique de « vérité et réconciliation », toute hypocrisie exorcisée. »
Au-delà de l’évocation historique, l’ouvrage est surtout une galerie de portraits de 50 figures aux idéologies divergentes : les hommes du pouvoir et les opposants, des bourreaux qui côtoient leurs victimes, des nationalistes qui occupent le même espace que le colonisateur. C’est peut-être cela l’ironie de ce livre qui se lit aisément, du fait des nombreux angles et posture qu’il suggère, de ses textes-portraits relativement courts accompagnés de dessins expressifs. L’ouvrage est issu d’une exposition organisée en mai 2010 au plus fort des célébrations des cinquantenaires de l’Indépendance et de la Réunification. Exposition qui ambitionnait de se mettre au service de l’éducation des plus jeunes par des tournées dans les écoles. Un an plus tard, on découvre l’autre projet de Richard Keuko, avec les mêmes ambitions. Un livre d’histoire à la démarche originale : donner vie aux acteurs. Un parti pris artistique sincère, qui rend hommage à ces personnalités à jamais entrées dans l’Histoire.
