Adaptation d’une pièce allemande à la sauce africaine ou plutôt sud-africaine, « Woyzeck on the Highveld », jouée au Théâtre Municipal de Charleville-Mézières, a fait le plein samedi dernier. Ces artistes sud-africains figurent parmi les trois compagnies du continent à être de la partie au festival mondial de la marionnette. Occasion pour les incrédules de découvrir l’art du spectacle à l’africaine. Les marionnettistes sud-africains donnent vie aux personnages du drame « Woyzeck », histoire écrite en 1837 par l’Allemand Georg Büchner, où se mêlent meurtre, jalousie et folie, le tout sur fond de misère sociale. Leur version parle de Woyzeck, travailleur immigré dans la capitale, en plein Apartheid, qui erre sur le plateau minier du Highveld, près de Johannesburg.
Le décor de la pièce est fantomatique, avec des usines et des bidonvilles en ruines et surgit en arrière-plan des marionnettes, dans un film d’animation du réalisateur William Kentridge, comme un paysage reflétant leur imaginaire tourmenté. Ces images servent à la fois de décor et dévoilent les pensées troublées des personnages, substitués ici à des marionnettes à tige. Certes, elles sont faites de matière inanimée, mais elles n’ont pas leur pareille pour traduire l’univers crasseux et défaitiste de la pièce. Ces marionnettes, presque à taille humaine, allègent toutefois le poids de la souffrance, ajoutant à certains moments, une touche d’énergie et d’humour noir, qu’un observateur cynique – acteur humain, bien vivant – vient accentuer par des phrases choc, dites pour ironiser la misère de Woyzeck.
Cette version proposée par le Handspring Puppet Company marque sa première collaboration avec le réalisateur William Kentridge, en 1992. Fondé à Cape Town en 1981, le Handspring Puppet Company doit d’ailleurs sa notoriété internationale au réalisateur de son spectacle, célèbre artiste de Johannesburg, sculpteur et concepteur de dessins d’animation au noir de charbon. Plusieurs fois primé en Afrique du Sud et salué lors de nombreux festivals internationaux, « Woyzeck in the Highveld » est un classique de la compagnie, présente au festival de Charleville-Mézières depuis 1985.
