C’est entendu, l’incivisme des usagers apparaît comme la première cause des accidents de la route. « La route ne tue pas... », selon le refrain chanté naguère par un de nos musiciens. Même s’il convient, certes, de relativiser au regard des insuffisances d’une large proportion du réseau routier national, la réalité quotidienne montre que « c’est nous qui tuons... » sur nos routes. Au ministère des Transports, le diagnostic est posé depuis assez longtemps. Reste à appliquer la thérapeutique la plus adaptée au mal profond de l’insécurité routière. L’intervention récente de la Commission nationale anti-corruption au ministère des Transports, dans le cadre de la deuxième phase des Initiatives à résultats rapides dans le secteur des transports, a été l’occasion de mettre un peu plus le doigt dans la plaie. Les mauvais comportements et autres dérives à l’origine des trop nombreux accidents survenant sur nos routes ont un lien causal avéré avec les pratiques de corruption lors des examens pour l’obtention du permis de conduire.
L’informatisation à partir de 2009 de la délivrance des titres de transport, dont le permis de conduire, avait pu faire espérer sinon l’éradication, du moins une forte réduction du faux dans le circuit allant de l’examen du permis de conduire à la délivrance d’un document sécurisé. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, force est de constater le faux reste profondément enraciné dans les habitudes des intervenants sur toute la chaîne : candidats au permis de conduire, auto-écoles, services régionaux et centraux des Transports. Pressés d’obtenir le précieux document sans passer par une formation minimale payante suivi des épreuves de l’examen du permis de conduire, de nombreux candidats sans scrupule empruntent la voie de la facilité qui consiste à acheter littéralement le précieux document. Des promoteurs d’auto-écoles et des agents avides de gain facile s’en mettent plein les poches sans s’embarrasser non plus du moindre scrupule, dans un circuit bien huilé de corruption, en l’occurrence particulièrement meurtrier dans ses conséquences.
Le ministère des Transports a lancé récemment une opération d’assainissement dans le secteur des auto-écoles, dans le cadre d’une énième campagne de lutte contre les accidents de la circulation. Il est apparu qu’au mois de juin dernier, 307 auto-écoles clandestines ont été recensées dans les seules métropoles de Douala et Yaoundé. Aux 102 auto-écoles clandestines de Yaoundé auxquelles des mises en demeure ont été servies, il a été reproché en tête des manquements, outre l’absence d’autorisation d’ouverture, le manque de formateurs qualifiés. Il y a gros à parier que la plupart des structures de formation ainsi indexées regorgent de soi disant instructeurs titulaires de permis de conduire obtenus dans les circuits de faux qui sévissent dans les services publics des transports.