« Melancholia Africana » de Nathalie Etoke appelle « L’Afrodescendant » au dépassement de sa peau.
« L’Afrodescendant » parviendra-t-il à se libérer du poids de l’Histoire pour prendre en main et transformer son avenir ? Cette « douleur collective » pourra-t-elle générer des transformations radicales ? La Traite négrière, l’esclavage, la colonisation et la post-colonisation qui ont semé d’embûches l’existence des peuples africains appellent sans doute au pessimisme. Cependant, « L’indispensable dépassement de la condition noire », sous-titre de « Melancholia Africana », indique déjà la réponse que souhaite apporter l’auteure à cette question.
Dans cet ouvrage empreint de lyrisme, Nathalie Etoke raconte SA vérité. « Vérité de l’être noir, vérité qui veut comprendre l’histoire qui l’a produite, afin de se réapproprier sa destinée et de s’inventer un avenir… » Bref, « Nathalie Etoke théorise autant à partir de son savoir qu’avec ses émotions », pense Leonora Miano, préfacière de l’ouvrage.
Certes, certaines positions de l’auteure peuvent paraître tranchées. Ainsi, Nathalie Etoke pense notamment que l’on ne vivra jamais dans un monde déracialisé. « Il ne s’agit pas d’être postracial, mais post raciste », écrit-elle entre autres. Voilà sans doute pourquoi elle assume tout à fait la couleur de sa peau, le noir. Et ce, dans un contexte où « il est de bon ton en particulier quand on est noir, de se désolidariser du groupe auquel on est pourtant rattaché ». Pour Leonora Miano cependant, les positions de l’auteure ne cherchent pas l’affrontement, mais un apaisement qui ne surviendra que si chacun endosse sa part de l’histoire commune.
Ici, l’étude d’œuvres littéraires, de genres musicaux et de faits de langue explore les conflits mémoriels, les ambivalences historiques et le non-sens post colonial afin de mettre en évidence le parcours difficile de ceux qui sont condamnés à la liberté.
Fort de son originalité, « Melancholia Africana », essai interdisciplinaire, a reçu récemment le Frantz Fanon Book Award décerné par l’Association Caribéenne de Philosophie. Il s’agit d’un prix qui reconnaît la contribution d’un ouvrage à la pensée Caribéenne et afrodiasporique. Le jury est composé des anciens gagnants et de philosophes spécialisés dans les études africaines et afro-caribéennes.
Enseignante de littérature et de cinéma de l’Afrique francophone et de la diaspora au Connecticut College aux États-Unis, Nathalie Etoke est la plus jeune récipiendaire de ce prix. « Melancholia Africana » a été préfacé par l’écrivaine Leonora Miano, laquelle avait déjà joint en post face de son roman « Aubes Ecarlates », paru en 2009, des extraits de « Melancholia Africana », alors encore en chantier.
