Ces situations de banqueroute régulières des établissements de microfinance, proches des couches pauvres et délaissées du système bancaire classique, deviennent intolérables dans un pays qui a mis du prix à assainir le secteur des établissements financiers. Ces dérives qui pourraient menacer durablement le tissu économique, la paix sociale, et l'indispensable crédit de confiance à l'émergence ne méritent-elles pas davantage de vigilance? La mircofinance n'aurait pas connu un tel engouement et un grand succès à travers le monde, si le Pr. Yunus et d'autres pionniers n'avaient pas démontré que les pauvres étaient bancarisables et que l'activité de microcrédit était rentable. Seulement voilà, au Cameroun, certains « artificiers » des détournements et experts des légèretés de gestion, en jouant avec la législation, se sont engouffrés dans la brèche pour creuser le filon. Ils ont ainsi trouvé des proies et de nouvelles niches d'enrichissement rapide sur le dos des plus faibles. Par leurs actes d'indélicatesses, ils distillent le désarroi avec un esprit presque tranquille de cynisme : dans tous les cas ce n'est pas eux qui vont payer ! C'est l'Etat qui leur a donné l'agrément, autant dire les autres contribuables qui vont payer, du moins immédiatement, la note salée de leurs égarements égoïstes. Pourtant, les banques et les établissements de mircofinance (EMF) sont deux catégories d'institutions d'essence différente mais qui, bien souvent, se dévouent pour le même objectif : collecter l'épargne pour les besoins de financement de projets jugés rentables, au lieu de l'enrichissement personnel des promoteurs, que l'on observe malheureusement en ce moment. Si l'on a expliqué l'avènement du secteur de la microfinance par la défaillance du secteur bancaire traditionnel depuis en meilleure santé, il devient urgent de revisiter l'approche et de changer le fusil d'épaule si l'on ne peut garantir la sécurité de l'épargne citoyenne. Les niveaux des dispositifs prudentiels, de surveillance et de contrôle de l'Etat doivent impérativement être accrus et renforcés.
Si rien n'est fait dans ce sens, l'instabilité des EMF laissera soupçonner de fâcheuses complicités suspectes avec certaines autorités. En effet, la microfinance ne doit pas se détourner de ses objectifs de départ : combler le vide laissé par les banques pour lesquelles les pauvres représentaient un marché peu rentable et coûteux. Bien gérées, les EMF sont suffisamment rentables et dans un stade final de développement, elles devraient impérativement s'arrimer au système financier classique. La dynamique de la relation Banques/Institutions de microfinance devrait évoluer vers une certaine maturité qui fait que l'Etat doive exiger aux promoteurs des EMF de plus de fortes garanties comme la souscription d'une assurance crédible et pourquoi pas, l'exigence d'être couvert par une banque commerciale formelle. Au regard de la gestion actuelle, cette double efficacité sociale et financière représenterait un bon moyen non seulement pour éviter une perte sèche pour le trésor, mais aussi la multiplication des structures peu crédibles, onéreuses, risquées, peu commodes et peu recommandables.