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Dossier de la Rédaction

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Ce qui fait gagner Hugo Chavez

Le bouillant vénézuelien a remporté récemment pour la troisième fois consécutive la présidence. CT livre ici les sécrets de son succès. Ses détracteurs le disaient affaibli, voire moribond après de multiples traitements contre un cancer détecté l’année dernière. 

C’est pourtant un président candidat tout feu tout flamme qui a battu campagne et remporté haut la main la présidentielle vénézuélienne du 7 octobre dernier. En effet, Hugo Chavez, pour la troisième fois consécutive, a été élu président de la République du Vénézuela, avec 54,42% des voix, soit un peu plus de 10% de plus que son adversaire, Capriles. Celui-ci a d’ailleurs reconu immédiatement sa défaite. Ce qui n'était pas évident avant l'élection, au vu des tensions diverses et des provocations, qui avaient fait craindre pour le déroulement de cette élection.

En réalité, aucun observateur impartial ne pouvait douter de sa réélection, tant sa popularité est grande dans son pays. C’est que ses treize années au pouvoir ont permis de grandes réalisations grâce à l'utilisation judicieuse de la manne pétrolière à des fins sociales : augmentation et gratuité de la scolarisation, réduction des inégaités au sein de la population, multiplication des programmes de santé. Toutes choses qui ont permis d'améliorer le niveau de vie de la population. Résultat : l'écart de revenus entre les plus riches et les plus pauvres s'est réduit considérablement. L’indice de Gini servant à mesurer le degré d'inégalité de la distribution des revenus dans une société donnée, est passé de 0,46 à 0,39 en dix ans, (0 signifie l'égalité parfaite des revenus : ce qui n’existe nulle part). Le taux de pauvreté, lui, est tombé de 49,4% à 27,8% (entre 1999 et 2010), la mortalité infantile a chuté de 19,15% à 13,95%, et l'analphabétisme de 9,1% à 4,9%. A ce sujet, il faut signaler que l'UNESCO a déclaré le Venezuela "libre d'analphabétisme". Un compliment rarissime et mérité lorsque l’on sait que 95% des petits Vénézuéliens accèdent à l’enseignement supérieur. Autre victoire : sous sa présidence, le chômage a été divisé par deux.

Plusieurs ombres pourtant à ce tableau qui paraît idyllique. Hugo Chavez n'est jamais parvenu à émanciper son pays de la rente pétrolière. L'or noir fournit plus de 90% des recettes en devises du Venezuela. C'est sans doute là son plus grand échec. En outre, l'insécurité atteint des sommets. Le pays affiche le taux d'homicide le plus élevé d'Amérique du Sud (50 pour 100.000 habitants en 2011, selon les chiffres officiels) ; la corruption y est, dit-on endémique. Le taux d’inflation est monté à 31 % en 2002 et se maintient aujourd’hui au niveau de 27 %. Le pays souffre de pénuries alimentaires chroniques, ce qui l’oblige à importer 80% de sa consommation alimentaire. Les coupures d'électricité et d'eau sont très régulières.

Exubérant, aussi admiré que controversé, Hugo Chavez, l'homme fort du Venezuela est cependant un président apprécié par son peuple, ce qui est démontré régulièrement par tous les sondages qui donnent entre 61% à 69% d'opinion favorable. Cela se traduit aussi par les résultats des élections. Il a largement remporté trois élections présidentielles successives en 1998, 2000 et 2006 avec plus de 60% de voix.

NDZINGA AMOUGOU

« Chavez a rompu avec le discours dominant mondial »

Dr Stéphane Ngwanza, Géostratège, Chargé de cours à l’IRIC.

Contre de nombreuses attentes, Chavez vient de remporter la présidentielle pour un quatrième mandat consécutif. Qu’est ce qui fait sa force ?

Après 14 ans à la tête de la « révolution bolivarienne » qui a contribué à transformer le Venezuela, Hugo Chavez a su impulser un processus national populaire progressiste, largement porté par le peuple qui l’a soutenu avec ferveur. Outre la redistribution de la rente pétrolière, sa force réside dans de solides acquis de la « révolution bolivarienne » : division de la pauvreté par deux (avant son arrivée au pouvoir 66% de la population vivait dans la pauvreté), alphabétisation, accès à la santé gratuite et mise en place de magasins subventionnés dans les quartiers populaires, gratuité des universités bolivariennes, nationalisation de secteurs clefs de l’économie et contrôle bancaire, etc … autant de mesures qui sont loin du discours dominant mondial. Chavez a également promu avec conviction l’idée d’une nouvelle unité latino-américaine aux forts accents anti-impérialistes, ce qui a accru sa popularité bien au-delà de son pays.

Dr Stéphane Ngwanza : « Il est impératif que le Venezuela réoriente et diversifie son appareil productif ».

Malgré toutes les avancées, le pays reste loin d’être un pays émergent. Que reste-t-il pour que Chavez achève la révolution bolivarienne ?

Le Venezuela souffre du « syndrome hollandais », identifié dans les années 1960 comme la malédiction paradoxale frappant les pays disposant d'une rente minière, à l'origine d'un excédent commercial gonflant la valeur de la devise, ruinant donc les industries traditionnelles et concentrant ressources humaines et financières sur un seul secteur à la rentabilité exorbitante. Effectivement, la dépendance du pays envers le pétrole est extrême, puisque 96 % des recettes en devises - un record mondial - proviennent de ce secteur employant à peine 200.000 personnes directement et indirectement. Aujourd’hui, le groupe public pétrolier PDVSA finance la moitié du budget de l’Etat pour sa politique sociale, au détriment d’investissements cruciaux pour son activité (la production de brut stagne à 2,5 millions de barils par jour), et étouffe le reste de l’industrie. Il est donc impératif que le Venezuela réoriente et diversifie son appareil productif.

Comment envisagez-vous l’avenir du pays, les Etats-Unis ayant juré d’éradiquer le communisme en Amérique, l’insécurité restant galopante… et Hugo Chavez n’étant pas immortel ?

Le «tout pétrole» a d’autres effets collatéraux d’une dépendance totale aux importations. Le pays achète tout ou presque pour sa consommation courante à l’étranger. Chavez n’a trouvé aucun remède. Au mieux, il s’est efforcé de réduire la dépendance commerciale vis-à-vis des Etats-Unis au profit de la Chine et du Brésil. L’entrée dans le Mercosur, le grand marché commun d’Amérique latine, concrétise cette stratégie. La victoire de Chavez à la dernière élection présidentielle n’est pas sans conséquence sur l’équilibre géopolitique de toute l’Amérique du Sud. Celui-ci va assurément poursuivre sa politique « socialiste bolivarienne », et son projet d’émancipation totale de la tutelle des États-Unis. Il sait également que sa popularité peut vaciller si la situation ne s’assainit pas. Ces graves problèmes sont compliqués par un facteur récent, révolutionnaire lui aussi: la santé du président. Si elle venait à se compliquer, la succession pourrait être chaotique. C’est l’un des défis de son nouveau mandat, qui s’annonce fort difficile.


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