Un livre de Jean-Emmanuel Pondi permet de mieux cerner la personnalité du « guide ».
Jusque-là, l’on nous a peu donné à connaître Mouamar Kadhafi comme re-distribueur de la manne pétrolière de la Libye, quatrième producteur en Afrique. Si oui, à travers la part qu’il versait en soutien à des groupes armés en lutte soit pour l’indépendance de leur pays, soit contre les anciens colonisateurs. Sans éluder cet aspect dans un travail scientifique, « Vie et mort de Mouamar Al-Kadhafi. Quelles leçons pour l’Afrique ?», essai de 174 pages, de Jean-Emmanuel Pondi, récemment paru aux Editions « Afric’Eveil », nous fait découvrir d’autres facettes du guide de la révolution libyenne.
On apprécie mieux ce que Kadhafi a pu faire de l’argent du pétrole pour son pays et pour l’Afrique. Des libéralités accordées notamment au social ont assuré aux Libyens un niveau de vie que leur envient des populations de pays développés. En Afrique, le discours panafricaniste du Guide s’accompagnait d’un vaste programme d’investissements : la Libye, à travers Rascom, offre son premier satellite à l’Afrique, avec à la clef, une réduction du coût des télécommunications. La création du Fonds monétaire africain est en chantier pour relever les pays en difficulté au moment où commence la guerre en Libye. Présente dans 25 pays africains, Lap, une agence financière consacrait 5 milliards à l’Afrique dans des domaines variés.
Le colonel Kadhafi est tombé le 20 octobre 2011 après le bombardement d’un drone américain sur son convoi, suivi de son arrestation et sa mise à mort, vraisemblablement de sang-froid, par des rebelles libyens. Il apparaît évident à la lecture de cet ouvrage que le guide de la révolution libyenne a payé le prix fort de cinq principaux problèmes qui ont constitué, tout au long de son règne de 42 ans, des ponts de rupture avec l’Occident. Le prix du pétrole, le choix des fournisseurs d’armements, le soutien aux organisations terroristes, des actes de provocation du leader libyen à l’encontre des pays du Nord, last not the least, l’anticolonialisme et l’anti-impérialisme de Kadhafi.
L’environnement l’aura sans doute façonné : l’auteur nous fait découvrir, en effet, l’enfance d’un homme dans une Libye spoliée par des invasions et des colonisations successives. Le jeune patriote, admirateur du président égyptien Nasser, n’entre dans l’armée que pour s’outiller à libérer son pays des dominations étrangères. Le coup d’Etat perpétré, sans effusion de sang, dans la nuit du 31 août au 1er septembre 1969, contre le roi pro-occidental, Idriss, marque une étape déterminante de ce combat. Kadhafi au pouvoir, la révolution pouvait commencer… Première réforme de taille : le secteur pétrolier… Pour toutes ces raisons, la mort de Kadhafi a suscité jubilation et soulagement en Occident, désolation et inquiétude dans la plupart des pays au Sud, selon le constat de Jean-Emmanuel Pondi.
-« Vie et mort de Mouammar Al-Kadhafi. Quelles leçons pour l’Afrique ?», Jean Emmanuel Pondi, 174 pages, Ed. « Afric’Eveil », 2012.
