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Dossier de la Rédaction

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Plaidoyer pour une cession transparente des terres

Des propositions contenues dans un document-cadre présenté récemment à Yaoundé.

Au Cameroun, les demandes cumulées des cessions de terre à grande échelle à des fins agricoles, portent sur une superficie comprise entre 1,6 et 2 millions d’hectares (ha) à fin septembre 2012. Palmier à huile, riz, maïs, hévéa, sont les principales cultures développées sur lesdites terres. Et la demande de terres à des fins agricoles connaît une augmentation depuis 2008. Autant en Afrique centrale, que dans le reste du monde, le phénomène prend de l’ampleur. Il est même « réel et préoccupant », précise le Pr. Adolphe Minkoa She, l’un des cinq panélistes réunis récemment à Yaoundé dans la salle de conférence de la Friedrich Ebert Stiftung (FES), pour la présentation publique du document-cadre y afférent, intitulé : « Plaidoyer pour une réforme du régime juridique des cessions de terre à grande échelle en Afrique centrale ».

Le constat dressé, une étude a été menée par la FES, le Centre pour l’environnement et le développement (CED) et l’Association citoyenne de défense des intérêts collectifs (Acdic) dans les six pays de la sous-région Afrique centrale, choisis en raison de leur appartenance à la même aire géographique. Les études révèlent que, malgré l’ampleur du phénomène, aucun pays de cette zone ne dispose d’une politique claire et cohérente destinée à encadrer les cessions de terre à grande échelle. Il s’agit ici des concessions dont la superficie varie de quelques dizaines à plusieurs centaines de milliers d’hectares avec des baux conclus pour des durées allant de 25 à 99 ans et des coûts variant d’un demi-dollar à quelques dizaines de dollars à l’hectare.

La trentaine de recommandations formulées dans le document-cadre vise à concilier les intérêts de l’Etat, des investisseurs et des populations. Concernant la disponibilité de la terre, il est suggéré d’adopter ou de réaffirmer dans les législations foncières et domaniales une distinction entre le domaine public, le domaine privé de l’Etat et des particuliers et le domaine national ou rural constitué des terres non-objet d’approbation par les voies modernes par les particuliers ou par l’Etat. Quant à la disposition des terres, les experts et représentants de la société civile proposent entre autres d’adopter un cadastre unique pour tous les titres d’exploitation des ressources naturelles et d’instaurer un mécanisme de suivi indépendant de l’exécution des contrats de concession des terres. Chacune des parties impliquées dans la confection de ce document travaille maintenant à une large diffusion de cette réforme juridique.


« Les demandes sont examinées dans les règles de l’art »

Jacqueline Koung à Bessike, ministre des Domaines, du Cadastre et des Affaires foncières.

Madame le ministre, quel est le régime juridique qui organise aujourd’hui la cession des terres à grande échelle ?

La législation camerounaise en matière de cession des terres s’articule autour de deux principaux textes que sont les ordonnances n° 74/1 et n° 74/2 du 06 juillet 1974 fixant respectivement le régime foncier et le régime domanial. Ces textes, il faut le souligner, ne sont pas a priori orientés vers l’acquisition des terres à grande échelle. Ces régimes organisent l’acquisition des terres en fonction des statuts des terrains en cause et prévoient des mécanismes d’encadrement qui tiennent compte de la nature de la transaction et de la qualité des parties. Le principe en matière de vente est celui de l’adjudication, en ce qui concerne les terrains du domaine privé de l’Etat. Cependant, lesdits terrains peuvent également être vendus de gré à gré, pour des raisons de rationalité économique et de justice sociale, ou cédé à bail, notamment lorsque des superficies importantes sont en jeu. Les terrains du domaine national de première catégorie peuvent faire l’objet d’immatriculation directe. La procédure de base pour les terrains du domaine national de deuxième catégorie, c’est la concession qui peut déboucher après réalisation des investissements sur une concession définitive ou sur un bail. Bien entendu, il ne peut être que proposé des baux emphytéotiques pour les étrangers ayant mis en valeur une dépendance du domaine national. De plus, les personnes physiques ou morales de nationalités étrangères, ainsi que les missions diplomatiques et consulaires et les organisations internationales ne peuvent conclure des baux ou acquérir des propriétés immobilières en zones frontalières. S’agissant des terrains du domaine public, ils sont inaliénables, imprescriptibles, insaisissables et insusceptibles d’appropriation privée. Ils ne peuvent donc faire l’objet que d’occupation temporaire.

Cas pratique. Un industriel a besoin de 100 000 hectares pour cultiver le palmier à huile. A qui doit-il s’adresser ?

Nous recommandons à cet industriel de contacter au préalable le département technique en charge de cette activité, à savoir le ministère de l’Agriculture et du Développement rural, pour s’accorder sur les contours du dossier et la localisation du projet. Cet industriel s’adressera ensuite au partenaire de son choix et sa demande sera traitée en fonction des statuts des terrains qui viennent d’être présentés. Mais, il est peu probable, en l’état actuel de notre configuration territoriale et de l’encadrement juridique, qu’un particulier se retrouve avec 100 000 hectares de terrain immatriculés. C’est généralement dans le domaine national et, dans une moindre mesure, dans le domaine privé de l’Etat que les superficies aussi importantes de terrain sont disponibles. Dans ces conditions, c’est le ministre chargé des Domaines qui sera saisi ou ses services territoriaux compétents.

Une étude menée par la société civile sous la houlette de la Fondation Friedrich Ebert fait état de ce que des terres sont cédées en marge de la procédure réglementaire. Qu’en est-il ?

N’ayant pas encore pris connaissance de ladite étude, je ne peux pas me prononcer de façon catégorique. Mais, en ce qui concerne mes services, des dispositions sont prises à tous les niveaux pour que les demandes qui nous sont adressées soient examinées dans les règles de l’art. Néanmoins, certaines mauvaises pratiques que nous déplorons et réprimons sont quelquefois constatées. Certaines personnes continuent à vendre ou à louer un même terrain à plus d’un demandeur. Des vices de procédure sont également constatés, notamment lorsque des personnes qui ne réunissent pas les conditions fixées par la loi, tentent d’immatriculer leur terre par voie directe, alors que c’est la concession qui est exigée. Des tentatives de contournement sont également observées lorsque, pour échapper aux restrictions fixées par la loi, un potentiel acquéreur se sert de prête-noms pour obtenir plus d’un lot domanial en ville alors que cela est interdit, ou procède au fractionnement des superficies pour échapper aux seuils fixés par les textes. Je tiens tout simplement à signaler que toutes les cessions des terres en marge de la procédure légale susmentionnée sont non seulement nulles et de nuls effets, mais exposent les auteurs et les complices de ces pratiques aux sanctions pénales en vigueur.

Quelle est la politique nationale en matière de cession des terres à grande échelle ?

Le régime foncier et domanial camerounais comporte des mécanismes d’encadrement permettant d’examiner avec la plus grande rigueur les demandes d’attribution des terrains portant sur des grandes superficies. Un accent particulier dans ce cadre est notamment mis sur l’importance du programme d’investissement à réaliser et les retombées pour notre économie et les populations. Par ailleurs, un accent majeur au niveau du gouvernement est actuellement mis sur l’implantation de l’infrastructure cadastrale et la confection des instruments de planification des aménagements et de l’occupation des sols. C’est dans ce cadre que la loi n° 2011/008 du 06 mars 2011 d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire au Cameroun a été édictée. Le gouvernement conduit actuellement une importante politique de constitution des réserves foncières pour répondre adéquatement à une demande de plus en plus forte mais aussi multiforme et variée. Je dois, par ailleurs, souligner que dans le cadre de la réforme foncière prescrite par le président de la République, en cours d’élaboration, des mécanismes de renforcement de la protection des terrains domaniaux et de préservation de notre patrimoine foncier national vont être introduits.

Qu’est-ce qui est fait pour assurer une transparence et garantir les droits des populations paysannes ?

S’agissant en particulier des populations paysannes, il faudrait commencer par dire que leurs représentants siègent dans la quasi-totalité des commissions chargées de l’examen des demandes et en particulier au sein de la Commission consultative où elles sont représentées par le chef et deux notables du village ou de la collectivité où se trouve le terrain. De plus, les textes prévoient une répartition des revenus tirés de l’attribution des parcelles du domaine national, soit à titre de concession, soit à titre de bail, entre l’Etat, la commune du lieu de situation du terrain et la collectivité villageoise intéressée pour la réalisation d’un projet d’intérêt communautaire. Sur un tout autre plan, en application des dispositions légales et règlementaires en vigueur, des consultations et des audiences publiques sont organisées en prélude à la réalisation de tout programme d’investissement d’envergure et les cahiers de charges imposés à l’investisseur sont assortis d’un plan de gestion sociale et environnementale qui tient compte de la garantie des droits et des besoins fondamentaux desdites populations.

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