Bannière

Newsletter


Publicité

Bannière
PUBLICITE

Dossier de la Rédaction

PUBLICITE
Bannière

Adieu, humble pasteur !

Il était pape. C’est-à-dire, l’un des plus grands parmi les très grands de ce monde, matérialisant dans sa seule personne le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel, l’opulence et le dénuement, la terre et le ciel. Sa frêle silhouette, son regard perçant où s’allumaient les étoiles de la bonté, sa voix lente et posée, n’inspiraient pourtant aucune peur, pas plus qu’ils ne reflétaient une espèce de toute puissance castratrice. Au contraire ! Tout autour de Benoît XVI n’était que respect, confiance, et douceur.

Dans le bruit et la fureur médiatiques, Benoît XVI a gardé avec courage les principes fondateurs de l’Eglise, affronté les déviances des prêtres, évêques et cardinaux avec une ferme détermination. La pédophilie des prêtres ? Il n’a pas joué le déni, il a condamné, et demandé pardon au nom de l’institution qu’il dirige. L’homosexualité ? Il a réaffirmé le niet de l’Eglise, sans pousser à l’homophobie. Le sida et le préservatif ? Il est resté sur la ligne du guide spirituel : comment demander aux fidèles d’acheter des combinaisons anti-feu, si on peut plus simplement leur conseiller d’éviter le feu ?

C’est ce pasteur-là, et pas un autre, que Dieu avait désigné pour conduire son peuple, à la suite du regretté Jean-Paul II, dont il était le doctrinaire. Un pasteur à la foi vibrante, un érudit et un savant, à l’humilité consumée, que les médias de son Occident natal présentaient comme austère et peu charismatique. En jugeant si sévèrement les apparences, que savaient-ils de son âme, et que leur importait-il ?

C’est ce pape discret qui a également choisi une sortie tonitruante : la renonciation à la charge pontificale, pour « se consacrer à la prière et à la méditation », en raison de ses forces physiques vacillantes. Au milieu du tollé mondain et de la tristesse des fidèles catholiques, le pape s’est résolu à quitter la scène. Un véritable électrochoc. Un séisme à l’échelle planétaire.

Le pape symbolise en effet la plus grande autorité spirituelle et morale de notre temps. En cette époque trouble, caractérisée par la montée des extrémismes, le terrorisme, la pauvreté du plus grand nombre, les cataclysmes naturels, l’insurrection contre les frontières morales et les repères civilisationnels (le sacré, la famille, le mariage, les interdits), la renonciation du pape, perçu comme le dernier rempart, a pu plonger dans l’angoisse plus d’un.

Alors qu’il était parmi nous, il y a seulement trois ans, le chef de l’Etat avait déclaré au pape : « Nous sommes certains que la très haute autorité morale et spirituelle que vous incarnez, sera d’un grand secours pour alléger nos craintes et faire renaître l’espérance dans le cœur des Africains ».

Comment mieux expliquer la tristesse et le sentiment de vide que nous ressentons au départ de Benoît XVI ? Certes, les réactions ne sont pas les mêmes, selon que l’on est africain ou américain, européen ou asiatique, croyant ou athée. Pendant que les Européens y voient une preuve que l’infaillibilité du pape est un leurre, ou que l’Eglise est en déliquescence, l’Afrique pieuse y lit la volonté de Dieu transmise à un humble serviteur de l’Eglise qui, en renonçant à cette haute fonction de pouvoir, accomplit son vœu d’obéissance.

C’est aussi en filigrane le sens du beau message du président de la République à ce pape qui a honoré le Cameroun d’une façon singulière en le choisissant, pour aller à la rencontre de l’Afrique, comme la porte d’entrée du continent. Ce que le président Biya exprime en des termes si sincères et si émouvants, c’est ce que les Camerounais et les Africains de toutes confessions ressentent : un berger aimant et humble nous a visité et reconnus dans notre dignité, nous les mendiants de Dieu, les affamés de justice et de compréhension, y avons été sensibles. Nous lui en savons gré. Et nous ne l’oublierons pas.

Ce pape que nous aimions et qui nous a aimés ne nous avait pas jugés aux apparences et à la rumeur médiatique. Il avait campé notre moi profond. « Car le Cameroun est bien une terre d’espérance, disait-il, pour beaucoup d’hommes et de femmes de cette région centrale de l’Afrique. Des milliers de réfugiés, fuyant des pays dévastés par la guerre, ont été accueillis ici. C’est une terre de la vie, où le gouvernement parle clairement pour le droit des enfants à naître. C’est une terre de paix. Un pays béni, une terre de promesses. »

Pour laisser partir Benoît XVI, nous aurons besoin de nous convaincre qu’il n’est pas parti tout à fait, et continuera à vivre à travers ses idées – « La force » de celles-ci, affirme le président de la République, « a traversé le monde catholique et emporté l’admiration même de ceux qui ne partagent pas sa foi et ses convictions ». Les idées du pape resteront donc comme sa trace indélébile dans un monde éphémère, sa profondeur et sa constance constitueront toujours un pied de nez élégant à un monde versatile qui, quant à lui, a définitivement fait vœux d’inconstance.

Adieu, humble pasteur. Merci de nous avoir tant donné. Ta trace sur le monde et sur l’Afrique est lumineuse et inviolable.

Commentaires (0)
Seul les utilisateurs enregistrés peuvent écrire un commentaire!

!joomlacomment 4.0 Copyright (C) 2009 Compojoom.com . All rights reserved."



haut de page  
PUBLICITE
Bannière