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Dossier de la Rédaction

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Leçons majeures

Depuis vendredi, les Camerounais sont au moins aussi heureux que les Français d’avoir retrouvé sains et saufs tous les membres de la famille Moulin-Fournier, enlevés le 19 février dernier à l’Extrême-Nord du Cameroun, alors qu’ils y étaient en villégiature. Et pourquoi les Camerounais seraient-ils si heureux ?

D’abord parce qu’ils y ont cru. Il serait dangereux et triste, en effet, de considérer l’extrémisme religieux et le terrorisme comme une fatalité absolue, face à laquelle tous les systèmes sécuritaires et tous les Etats seraient désarmés. Les Camerounais l’ont certes intégré : nous vivons dans un monde dangereux où personne n’est à l’abri des accès de folie ou de violence meurtrière provenant d’individus ou de groupuscules.

Mais notre pays, sans prétendre être une exception dans le genre, a fait de la prévention des extrémismes son arme de dissuasion massive. La société de tolérance, de liberté religieuse, de respect de la différence, que nous construisons autour du président Paul Biya depuis 30 ans est, en effet, pour les Etats, l’une des digues les plus sûres contre la violence extrémiste. Car si celle-ci est alimentée par l’idéologie et les armes, elle naît bel et bien dans l’esprit et le cœur humain. Et c’est là qu’il faut la déloger.

Nous sommes aussi satisfaits du dénouement heureux de ce drame parce que le modèle politico-socio-religieux sur lequel se bâtit notre société est fondé sur la paix, aux antipodes de toute forme de violence. Dans toutes les tribunes du monde, Paul Biya s’est exprimé et a martelé les mots « paix » et « stabilité » ; des observateurs parfois avertis ont pu croire qu’il déclamait un slogan creux, ou pire, qu’il agitait une croquemitaine pour bâillonner les contestataires et justifier certains choix politiques. Les plus honnêtes ont pourtant dû se rendre à l’évidence : l’aspiration à la paix est pour les dirigeants du pays un choix ardent, et pour tous les Camerounais une profession de foi, le cadre idéal de la vie communautaire. C’est le premier concept de notre devise « Paix, travail, patrie ». La paix est ici quasiment une idéologie, une identité.

Comment ne pas comprendre alors que l’enlèvement de cette famille française qui vivait heureuse chez nous ait constitué pour tous un choc, un véritable traumatisme ? Au-delà du caractère inédit et brutal de l’enlèvement, de la crainte d’un probable impact négatif sur l’économie locale basée sur les recettes touristiques et des dommages inquantifiables liés à l’image de marque, il y avait pour nous Camerounais, le refus de la contagion et de la déportation sur notre territoire d’un conflit aux relents d’intolérance religieuse.

Malgré la part d’incertitude que ce type de transaction comporte, malgré les silences angoissés de l’attente, les Camerounais avaient donc le secret espoir que Paul Biya, en collaboration avec la France et le Nigeria, et dans le style qui est le sien, tout en discrétion et efficacité, trouverait le moyen de ramener les otages à la maison, comme il l’avait déjà fait par le passé, en 2008, avec l’équipage d’un bateau attaqué au large de nos côtes.

Comment l’exprimer ? Nos compatriotes dans leur majorité tiennent pour acquit que la longue expérience du chef de l’Etat sur la scène politique nationale et internationale, ses nombreuses connections dans tous les milieux importants, son habileté à manœuvrer, le mettent en situation de toucher n’importe quel lobby pour la bonne cause. Et même si pour des raisons sécuritaires ou des intérêts diplomatiques, le secret des négociations ne peut être divulgué, ses compatriotes savent d’instinct qu’il y a pris une part déterminante, - ce que confirment d’ailleurs François Hollande, Laurent Fabius et Moulin Fournier – et que dans sa modestie habituelle, il ne tirera jamais la couverture de son seul côté. Ce qui le grandit plus encore à leurs yeux.

Les leçons à tirer de ce drame qui s’achève en conte de fées pourraient être multiples. Citons-en quelques-unes : on ne vient pas à bout de la violence par la violence ; le silence est d’or ; gardes-toi de juger sur les apparences ; on a souvent besoin d’un plus petit que soi ; mon pays, c’est là où mon cœur se trouve ; Dieu sait tirer le bien du mal, etc. Mais de ce salmigondis de messages, le président Biya choisit d’en garder un : la nécessité d’une coopération plus étroite entre pays pour préserver la sécurité du monde. Peut-être se donne-t-il là une nouvelle croisade, à la hauteur de son rêve de leader politique : un monde sûr et solidaire…

Sans rien enlever de la pertinence de cette leçon majeure, nous pouvons en retenir une dernière : il est temps pour la France et les Français de porter un autre regard sur le Cameroun et sur ses dirigeants. Un regard dénué de préjugés et décomplexé, un regard sans condescendance, bienveillant, moins chargé des poncifs et des turpitudes supposées de la « Françafrique », ce concept franco-français qui caricature nos relations sans les appeler à plus de hauteur.

Sans le savoir et sans le vouloir, les Moulin-Fournier, cette famille française qui aime le Cameroun, et que nous avons déjà adoptée, en décidant de demeurer au Cameroun malgré l’enlèvement et malgré les pressions, écriront peut-être les prémices de cette nouvelle page de l’histoire entre le Cameroun et la France, qui pourrait s’intituler : « De la suspicion à la confiance ».

 

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