Comment un pays qui « ne serait pas gouverné » avance sereinement vers son émergence.
Abandonnant le gouvernail du Cameroun, le président Paul Biya voguerait tranquillement à l’étranger, se prélassant au bord du lac Leman, en Suisse ! Lancée par un journal en ligne il y a quelques semaines , en août dernier, la supercherie vient d’être reprise et relayée par un quotidien local, avec d’autres mots, pour une conclusion à la fois lapidaire, fallacieuse et prétentieuse. Le Cameroun, allègue-t-il, ne serait pas gouverné. L’on penserait à une mauvaise blague ponctuelle s’il ne s’agissait d’une rengaine ressassée et amplifiée sous de multiples formes. Souvenez-vous, il n’y a pas longtemps, on l’a subodoré fatigué. Paul Biya a répondu avec un zeste d’humour, par une question qui en disait long : « ai-je l’air si fatigué ? » Il y a une dizaine d’années, les lecteurs d’un quotidien de chez nous découvraient, abasourdis par cette révélation aussi tonitruante que rocambolesque, qu’il était à la tête d’un Cameroun sur pilotage automatique. Qui peut donc croire sérieusement qu’une telle prestidigitation dure depuis plus de trente ans, défiant les obstacles de toutes natures ? Prenant manifestement le contre-pied, d’autres ont pu épiloguer sur le Cameroun immobile ! Et pourtant, il avance. Sans troubles. Malgré les difficultés inhérentes à cette œuvre complexe. Le contexte électoral actuel n’est sans doute pas étranger à cette rengaine.
Il est loisible d’observer, depuis le retour du Cameroun aux élections pluralistes en 1992, que l’approche de chaque échéance électorale apparaît, hélas, propice à quelques « analyses » médiatiques ciblées de la même rengaine. Un hebdomadaire paraissant à Yaoundé a pu écrire à ce sujet qu’on vit « une schizophrénie journalistique » au Cameroun à l’approche de chaque échéance électorale. Il en est ainsi aujourd’hui, à quatre jours du démarrage de la campagne électorale des élections législatives et municipales du 30 septembre prochain, comme ce fut le cas avant et pendant la campagne pour l’élection présidentielle d’octobre 2011 ou bien des élections législatives et municipales de 2007. La désinformation est parfois allée jusqu’à la négation de la réalité dans le cas de l’élection des sénateurs, puisqu’on a pu lire qu’elle n’aurait pas lieu à la date prévue, alors que le collège électoral avait déjà été convoqué.
Le message véhiculé dans ce contexte est à la fois contradictoire et mystificateur. Il veut laisser croire tantôt que le président de la République ne ferait rien, ne travaillerait pas, tantôt qu’il interviendrait partout à travers ses prétendus « affidés ». In fine, il s’agirait de démobiliser les électeurs puisque tout est supposé être manipulé, pour ensuite se positionner en porte-parole de ceux qui crient continuellement au faux. Il n’est pas inutile de rappeler que plus d’une quarantaine de partis politiques se sont librement engagés dans la course aux places de députés et de conseillers municipaux, chacun présentant des candidats dans les circonscriptions électorales de son choix. Les électeurs, quant à eux, exerceront leur devoir de citoyens librement dans l’isoloir. Il est sans doute important de leur expliquer qu’au-delà des pesanteurs socio-politiques, ils ont ce pouvoir de choisir leurs gouvernants librement.
La vigilance, en cette période, est donc de mise. Surtout pour les électeurs, interpelés par toutes sortes de sirènes, de bonne comme de mauvaise augure, alors qu’il est important pour eux de conserver leur stabilité et leur sérénité psychologique voire politique.