En cette période de campagne électorale, comme à l’occasion annuelle du défilé de la fête nationale du 20 mai, le signe le plus visible de l’adhésion d’un citoyen à un parti est le pagne de cette association politique. C’est aussi l’un des outils de marketing les plus usités. L’adage populaire suivant revêt ici son sens premier : « on reconnait le moine par l’habit », bien que le même proverbe souligne également que « l’habit ne fait pas le moine ». Imprimé généralement aux couleurs et aux insignes du parti, avec ou sans l’effigie du leader, ce pagne est arboré par les militantes et les militants sous toutes les modes vestimentaires occidentales et africaines : chaussures, pantalons, vestes et vestons, chemises, cravates, tailleurs dames, robes et jupes, « kaba-ngondo »…C’est fait au gré des goûts et des orientations de chaque regroupement. Le pagne du parti est souvent mis en valeur avec d’autres parures, toujours aux couleurs partisanes : foulards, écharpes, boucles d’oreilles, chapeaux et casquettes, macarons, sans négliger d’autres gadgets comme les sacs à main, les crayons, les vignettes. Il sert autant au pavoisement des salles de réunions que des voitures en tête des cortèges des rallyes du parti. Tout cela favorise d’ailleurs le maintien ou la création d’emplois locaux plus ou moins saisonniers et le développement de multiples affaires parfois juteuses, faisant ainsi la joie de nombreux tailleurs, sérigraphes, teinturiers, cordonniers, etc…
Mais n’allez surtout pas croire que tous les partis politiques engagés dans la compétition pour les élections législatives et municipales du 30 septembre prochain font imprimer des pagnes et fabriquer des gadgets. La bonne volonté, évidemment, ne suffit pas pour le faire. Vendu ou distribué aux militantes et aux militants de la première heure tout comme aux recrues de fraiche date, au gré des décisions de l’état-major et des cadres, le pagne du parti est avant tout une affaire de moyens. Sa fabrication, son transport vers les lieux d’implantation du parti, sa vente ou sa distribution à titre onéreux ou généreux mettent en branle des moyens financiers, matériels et humains et sans doute une probité qui ne sont pas aussitôt à la portée de tous.
Pour s’en convaincre, il suffit d’observer attentivement les tenues vestimentaires partisanes des participants aux différentes réunions de la quarantaine de partis politiques actuellement en campagne électorale. Ces tenues les distinguent en une sorte de classification sommaire. Les partis politiques les mieux nantis, qui se retrouvent d’ailleurs parmi ceux qui sont ou ont été représentés à l’Assemblée nationale ou bien administrent des communes, ont chacun son pagne. Les autres se contentent, par ordre décroissant, des foulards, des écharpes et d’autres insignes visibles comme des pins ou encore de tee-shirts plus ou moins délavés. L’essentiel est que les militants, quand il y en a, s’y retrouvent et reconnaissent les couleurs de leur parti. C’est à l’image de la société camerounaise où toutes les cérémonies voulues mémorables, dédiées aux vivants ou aux morts, ont pour signe extérieur de ralliement, de reconnaissance, d’attachement voire de fortune, le pagne de circonstance.