On ne les a pas beaucoup vus. Pas beaucoup entendus. Nos ministres. Gélifiés qu’ils l’étaient au lendemain de la sortie présidentielle du 31 décembre dernier sur l’inertie. Le président de la République n’avait pas mâché ses mots à l’égard de ces attitudes et pratiques improductives qui tirent le Cameroun vers le bas. Dans l’opinion publique, cette dénonciation n’augurait rien de bon pour les membres du gouvernement. L’on se demandait : pour qui sonne le glas ? Et pendant la première semaine de janvier, silence radio du côté de ces personnalités de la République. Aucun séminaire présidé, représentations personnelles dans les rares ateliers organisés, demandes d’interview rejetées… plus grand monde sur le devant de la scène médiatique. Comme un champ de ruine… Le temps de digérer le coup de massue présidentiel et d’observer la direction du vent. L’on avait même commencé à se demander ce que d’aucuns avaient fait de leurs « titres fonciers » dans certaines émissions télé et autres pages de journaux.

Depuis, beaucoup d’eau a passé sous les ponts. Ne voyant pas le tsunami tant annoncé leur tomber sur la tête, beaucoup ont recouvré leurs esprits, repris de l’assurance, osant s’aventurer à l’extérieur et parlant même à nouveau aux médias. Les voilà donc, tambours battants, engagés dans un vaste mouvement de réveil : les églises dont c’est la spécialité n’ont qu’à bien se tenir ! La déferlante est en marche. La multiplication des conférences annuelles des services centraux et déconcentrés, -c’est le truc du moment-, servant de cadre à cette remobilisation des troupes. Chiffres et rapports d’évaluation à l’appui, l’on critique l’immobilisme et le manque d’engagement des collaborateurs. Tous les torts sont rejetés sur ces derniers.

Si les objectifs n’ont pas été atteints, évidemment c’est la faute des autres. Tous ces fonctionnaires qui se pointent au bureau après 10h, s’assoient sur les dossiers lorsqu’ils ne sont pas « juteux », ne suivent rien, manquent de vision et courent seulement après les missions. C’est peu dire que l’ambiance est survoltée dans certaines de ces grand-messes. Sur le moment, de grandes résolutions sont prises à tour de bras : travailler plus et durement, développer des stratégies précises pour produire davantage, mener des actions éclatantes pour sortir le secteur de la léthargie. Des directions centrales aux délégations, l’on s’active à la recherche d’idées neuves pendant 24 heures ou plus. Tout cela, autour de petits fours et autres gallinacés. Surtout, ne demandez pas à voir la facture ! Bref, passons.

Sauf que l’année précédente aussi, l’on a exactement tenu les mêmes réunions et émis les mêmes vœux. Les mauvaises langues parlent d’ « incantations ». On leur donne bien raison. En effet, après des promesses idylliques sur les feuilles de route, le budget programme… l’on s’attendait à les voir à l’ordre du jour de ces assises « familiales ». Rien. Voici nos membres du gouvernement passés à autre chose –la lutte contre l’inertie-, sans avoir fait le bilan de leurs engagements précédents. Malheureusement, pour eux comme pour les populations essoufflées par ces rassemblements à l’issue desquels l’on promet monts et merveilles, plus personne n’est dupe. Le peuple veut du concret : des écoles, des hôpitaux et des soins appropriés, des routes, de l’eau, de l’électricité, des logements sociaux dignes de ce nom… Les populations ont soif de développement, de progrès. Pour cela, les rengaines éculées doivent être mises aux rebuts. La récupération des propos présidentiels, mixés à toutes les sauces, s’arrêter. Les vains discours, les effets d’annonce, le frémissement actuel doivent céder la place à des réalisations concrètes. En décembre, il sera toujours temps d’aller voir, ministère après ministère, de quoi auront accouché toutes ces montagnes. Et nous espérons bien trouver des mammouths et non des souris.