La désillusion perceptible dans les pays ayant connu des révolutions est à la mesure de l’espoir soulevé lors du déclenchement de ce processus. Les populations ayant cru à ce phénomène sont d’autant plus déçues qu’elles ont espéré que le changement des dirigeants s’accompagnerait automatiquement par des progrès sensibles dans la gestion de leurs pays. Surtout que le message véhiculé était particulièrement flatteur.
En Libye, trois ans après la chute de l’ancien guide libyen, les autorités peinent à reprendre en main la direction du pays. Autant le Conseil national de transition (CNT) qui a pris les commandes de l’Etat, après la chute de Kadhafi, a eu maille à partir avec les difficultés du pays , autant le Congrès général national (CGN) qui lui a succédé n’ y a pas encore trouvé des solutions dans un contexte où les groupes armés dictent leur loi sur une partie du territoire national y compris à Tripoli, la capitale et où la production pétrolière , principale mamelle nourricière du pays, a diminué d’au moins 50% . A telle enseigne qu’une nouvelle intervention militaire étrangère est envisagée par les autorités pour faire face au chaos. Certes, l’Etat n’est pas affaibli en Egypte comme en Libye, toutefois, la révolution égyptienne a accouché d’une contre-révolution en juillet 2013. L’intransigeance des Frères musulmans, qui ont profité de la révolte des manifestants de la place Tahrir, a irrité de nombreux Egyptiens et favorisé le retour en force de l’armée. Encore que durant leur courte présidence Mohamed Morsi et ses partisans n’ont pas pu ou su trouver des réponses aux préoccupations de leurs compatriotes soucieux d’améliorer leurs conditions de vie. La Tunisie a beau exhiber sa nouvelle Constitution, se réjouir de la vitalité de sa démocratie et se consoler de ce que sa révolution n’a pas généré autant de violences que chez certains Etats voisins. Le parcours révolutionnaire dans ce pays a aussi été émaillé de moments difficiles notamment à la suite des meurtres des opposants Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi en février et juillet 2013, même si le consensus a finalement prévalu. Confirmant ainsi l’incontournable réalité selon laquelle les désirs des populations en faveur du bien-être sont invariables quelle que soit la coloration politique des gouvernements. Un réajustement s’impose donc. De sorte que les révolutions, qui étaient censées améliorer les conditions de vie des populations, s’adaptent à cette vocation pour revêtir leurs lettres de noblesse.