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Dossier de la Rédaction

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Comment le peuple a été spolié

Les condamnés bénéficiaires du décret présidentiel du 18 février portant commutation et remises de peines ont bel et bien été reconnus coupables d’actes commis au détriment du bien-être des populations.

Cet avocat ne croyait pas si bien dire, dans les colonnes de Cameroon Tribune, il y a une semaine: « Le pardon n’efface pas les crimes et délits commis ». Le propos s’applique évidemment à tous les concernés par le décret de commutation et remise de peines du 18 février dernier, qui suscite moult commentaires et interprétations depuis les premières levées d’écrou. S’agissant particulièrement des cas Titus Edzoa et Michel Thierry Atangana qui cristallisent les attentions, un rappel des motifs de condamnation est suffisamment édifiant, pour celui qui souhaite se faire une idée du préjudice subi par l’Etat du Cameroun et à travers lui, les populations victimes directes ou collatérales des crimes et délits sanctionnés par la justice.

Ainsi, dans le cadre de l’affaire relative aux fonds mis à la disposition de l’ex-Office national de Commercialisation des produits de base (ONCPB), par l’Organisation internationale du Cacao, il est évident que les sommes ainsi débloquées étaient destinées à l’intérêt général. Précisément à une filière qui a longtemps été l’un des fleurons de l’agriculture camerounaise. Les personnalités en question ont été jugées et reconnues coupables d’avoir voulu distraire et d’avoir distrait tout ou partie de cet argent. En l’occurrence, pas moins d’un milliard de F. D’après les éléments d’accusation, plus d’un tiers de cette importante somme, soit 350 millions de F a effectivement changé de destination, se retrouvant dans un compte bancaire privé pour lequel MM. Edzoa et Atangana avaient une signature conjointe. Suffisant pour que les deux personnalités soient poursuivies et jugées.

Nous sommes là en face d’un cas d’école de ce que le président de la République relevait lors de son message de fin d’année à la Nation, le 31 décembre dernier. Ce « peuple d’individualistes, plus préoccupés de réussite personnelle que d’intérêt général… » Cette administration « perméable à l’intérêt particulier ». Entreprendre ainsi d’accaparer un milliard de F destiné à soutenir une filière agricole et donc des centaines de familles d’agriculteurs, est l’illustration grandeur-nature de cette attitude décrite avec véhémence par le chef de l’Etat. Et tous les Camerounais savent combien la filière cacao a subi les effets de la conjoncture économique depuis des années. Combien les planteurs de cacao, jadis prospères ont vu leurs revenus dégringoler, le bien-être de leurs familles mis à mal. Qu’est-ce qu’on aurait pu faire avec un milliard de F ? Beaucoup évidemment. Surtout qu’au moment où cet argent était débloqué, la production nationale avait entamé une chute significative (de 132.000 tonnes en 1988, on passait à 96000 tonnes en 1993 ; 97000 tonnes en 1994, 109000 tonnes en 1995). Des ressources comme celles mises à disposition auraient donc pu permettre au Cameroun de préserver au moins les acquis et garder sa place dans le peloton de tête des pays producteurs. C’était visiblement la philosophie derrière le soutien accordé par l’Organisation internationale du cacao. En choisissant de détourner ces ressources importantes, on choisissait alors d’accompagner toute la filière dans une chute brutale et de priver des familles entières de leur gagne-pain.

Et puis, il y a ce fameux Comité de pilotage et de suivi des projets routiers (Copisur), objet de la deuxième condamnation de Titus Edzoa, Michel Thierry Atangana et co-accusés. Là encore, des sommes à donner le tournis, des projets orientés vers le développement des infrastructures et l’amélioration du quotidien des populations camerounaises. Deux grands projets : Yaoundé-Kribi et Ayos-Bonis ont ainsi été mis entre parenthèses, alors même que leur pertinence était avérée depuis des décennies. Tous ceux qui peuvent aujourd’hui partir de Yaoundé à Bertoua en moins de quatre heures seront les témoins vivants. La route a finalement été inaugurée en 2012. Plus de 15 ans après. Et l’on voit tout le bien qu’elle fait. On voit aussi tout ce dont les populations ont été longtemps privées.

On pourrait dire la même chose au sujet de l’extension de la Société nationale de Raffinage (Sonara), projet pour lequel M. Edzoa a également été reconnu coupable de détournement de deniers publics. Le détournement portait sur une somme d’environ 400 millions de F. Le fameux projet d’extension a lui aussi été finalement lancé quelques années plus tard, en 2010 et est toujours en cours. Avec un retard qui a porté un sérieux coup à la santé financière de l’entreprise et prolongé les difficultés des Camerounais. En effet, le Cameroun continue à importer beaucoup de carburant parce que la société de raffinage a été conçue pour traiter du brut léger. Or, le pays produit de plus en plus de brut lourd. Le projet d’extension vise principalement à mettre en adéquation, l’outil de la Sonara et la matière première disponible. Un retard dans la mise en œuvre de l’extension a forcément des répercussions évidentes sur le coût de la vie (transports, prix des denrées, prix du carburant lui-même).

Pas besoin de revenir point par point sur tous les chefs d’accusation. Ces quelques exemples indiquent de manière éloquente que ce sont bel et bien les Camerounais qui paient dans leur chair, le tribut des atteintes à la fortune publique. Les tenants des thèses du procès politique et des pressions extérieures pour la libération des condamnés gagneraient à s’en souvenir avant de développer leur bel argumentaire. Surtout quand ils sont Camerounais…


 

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