L’attaque du palais présidentiel somalien, survenu mardi, a beau être spectaculaire, elle n’est pour autant pas surprenante. Le mode opératoire des rebelles shebab n’a pratiquement pas changé. Des hommes lourdement armés ont pénétré dans le bâtiment sous haute sécurité et se sont fait exploser tandis qu’en février dernier une voiture bourrée d’explosifs avait été mise à contribution pour ébranler les services de la présidence. La veille du précédent attentat contre la villa somalia, qui abrite le palais présidentiel, les shebab avaient attaqué le parlement.
Les pertes en vies humaines enregistrées au cours de chacune de ces attaques sont énormes tandis que les dégâts sont innombrables. Les shebab persistent ainsi dans la démesure et la négation de l’Etat somalien ainsi que ses démembrements.
Il y a lieu de relever que la dictature de Siad Barre (1969-1991) a beaucoup marqué les Somaliens. Celui-ci s’était appuyé sur trois clans pour assoir et exploiter les ressources du pays. Les autres clans étaient écartés et marginalisés. A la chute de Siad Barre, les clans se sont battus avec acharnement pour la conquête du pouvoir, source de tous les avantages. Pour leur part, les shebab se sont toujours opposés au retour d’un pouvoir central parce qu’ils estiment qu’il remettrait en cause l’application de la charia, la loi islamique, dans la société somalienne, et mettrait en place un système administratif semblable à celui de l’occident, leur éternel ennemi. Depuis lors, toute initiative visant à rétablir l’autorité étatique menace le pouvoir des clans et des seigneurs de la guerre qui craignent de perdre leurs avantages au profit d’un autre groupe. Selon eux, le pouvoir central n’est pas garant de l’intérêt général mais un instrument d’asservissement et de contrôle des ressources du pays. De nombreuses tentatives diplomatiques et militaires visant à inverser cette tendance ont échoué. Le déploiement des troupes de la Force de l’Union africaine en Somalie(AMISOM) a cependant changé la donne. Depuis 2011, ces troupes ont bouté les shebab hors de leurs bastions du sud et du centre de la Somalie obligeant ainsi les rebelles à replier en zones rurales Ceux-ci privilégient désormais les actions de guérilla et les attentats visant la capitale Mogadiscio et les institutions républicaines. Malgré la gravité de leurs attaques, les shebab ne pourraient jamais s’imposer en Somalie. Le limogeage, hier, des responsables de la police et des services de renseignements montre que le président somalien, Hassan Cheikh Mohamoud, a repris le contrôle des institutions de la République.