Bannière

Newsletter


Publicité

Bannière
PUBLICITE

Dossier de la Rédaction

PUBLICITE
Bannière

La cohésion nationale à l’épreuve de Boko Haram

« Ce n’est pas Boko Haram qui va dépasser le Cameroun. Nous les vaincrons ! », déclarait fermement le président de la République au moment de prendre l’avion le 2 août dernier à  l’aéroport de Yaoundé-Nsimalen, pour Washington, DC. Confiantes en sa détermination personnelle et revigorées par le dispositif militaire sans précédent qu’il avait fait déployer dans la zone septentrionale, forces vives du pays avaient alors dans un beau chorus décrété « l’union sacrée » autour du chef de l’Etat, chef des armées, en noircissant les pages de journaux de déclarations de soutien au président de la République et d’encouragement aux soldats enrôlés dans cette drôle de guerre. Dans les médias audiovisuels, les émissions interactives crevaient les ondes à longueur de jours et de nuits, sans parvenir à freiner la logorrhée et l’élan patriotique des intervenants, qui fustigeaient le terrorisme et le fanatisme religieux, clamaient l’esprit de tolérance des Camerounais, leur sacralisation de la paix, le nécessaire respect de la laïcité, et se mettaient mutuellement en garde pour conjurer le spectre de la violence aveugle et des conflits armés, qui avaient déstabilisé récemment certains pays frères. Nous nous étions alors tous félicités de cet éclatant consensus national.

Cependant, à l’heure où les multiples contacts formels et informels de Paul Biya noués dans le but d’élargir et de consolider la coalition régionale et internationale contre Boko Haram portent des fruits, alors que l’expertise et l’engagement de notre président sur cette question sécuritaire sont ostensiblement recherchés, loués, et soutenus par les Etats-Unis d’Amérique, les Nations Unies, et les pays africains, alors enfin que la réorganisation du dispositif militaire sur le front de la guerre donne des résultats palpables, voilà le Cameroun menacé par un ennemi insidieux : la division. Voici ressurgis du fond des inconscients des fantômes que nous croyions avoir transformés, intégrés – car il ne sert à rien de tenter de les effacer – au profit d’une nation forte et bariolée, unie et cosmopolite : le Grand Nord, le Grand Sud, les Grassfields… Exaltés dans leurs dissonances, leurs différences présentées comme abyssales, contradictoires, irréconciliables. Les mots fusent comme des flèches, de part et d’autre, dépassant sans aucun doute la pensée. Les accusations et les rancœurs aussi. Que sont devenues les promesses d’union et de vigilance dont les échos résonnent aujourd’hui encore ? L’ère du soupçon et des ressentiments ne doit pourtant en aucun as, succéder aux serments d’union et à la cohésion nationale.

C’est dans un contexte passablement tendu que le ministre de la Communication, porte parole du gouvernement, a dû monter vendredi au créneau pour désigner – redésigner, pour être précis – le véritable, le seul ennemi du Cameroun : Boko Haram, un groupe extrémiste, outrageusement violent, qui a ses racines au Nigeria. Les spécialistes de l’Intelligence et de la sécurité, que le commun des mortels, n’est pas, sont seuls qualifiés parce que c’est leur mission et parce qu’ils en ont les moyens pour pointer du doigt les tenants et les aboutissants de ces massacres à ciel ouvert, et de ces enlèvements qui nous laissent tous meurtris, impuissants, exsangues.

Comme le rappelle la sous-secrétaire d’Etat américaine chargée des Affaires africaines, Linda Thomas-Greenfield, hôte du chef de l’Etat ce week-end, la lutte contre le terrorisme est une œuvre de longue haleine. Une œuvre de patience, une œuvre collective. Tiendrons-nous jusqu’au bout de la nuit, jusqu’à la victoire prévisible, si nous sommes déjà, à ce moment même, sur les nerfs, ravagés par les rancœurs, dressés les uns contre les autres, sur la défensive ou sur l’offensive ?

Les Camerounais de l’Extrême-Nord, et ceux en particulier de tous ces petits villages devenus la cible des terroristes, ont besoin de notre solidarité et de notre unité. Nous ne devrions jamais perdre de vue que le Boko Haram est un triple péril, que nos divisions internes pourraient précipiter.

C’est un péril humanitaire en premier lieu, en considérant les familles endeuillées par la mort de soldats et de civils innocents, sans oublier les otages, les milliers de déplacés en déshérence, les villes détruites. Mais c’est aussi un péril sur la laïcité et le vivre ensemble, à travers ce discours si particulier contraire aux valeurs républicaines centrées sur le respect des différences et le caractère central de l’éducation. Enfin, il n’est que trop évident que l’expansion continue de Boko Haram, concentrée autour du Cameroun et du Nigeria, deux pays-phares d’Afrique subsaharienne, menace le devenir et le développement de toute cette région.

En effet, le Nigeria est désormais la première puissance économique africaine, une locomotive d’envergure pour impulser l’envol économique. Le Cameroun est quant à lui, le PIB le plus élevé de la CEMAC, la porte d’entrée, le grenier, le pilier et le stabilisateur de toute sa région, dont il accueille et intègre les travailleurs immigrés, les réfugiés, et une bonne part des institutions sous régionales.

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, la déstabilisation de ces deux pays par Boko Haram ne profiterait à personne, sauf à des nihilistes illuminés chez qui le spectacle de la désolation humaine et des tas de ruines, bref de l’Apocalypse, provoque une malsaine jouissance. Mais sont-ils encore des hommes ?

En ce qui nous concerne, nous croyons qu’il est temps que s’arrêtent, chez les élites politiques et intellectuelles, la sinistrose et la fascination du chaos. Celles-ci ne génèrent que haines, diversion, indolence, inertie. Elles nous attirent vers le souffle de l’abîme. Attardons-nous, pour une fois, pour longtemps, sur les efforts probants du Cameroun dans la lutte contre Boko Haram et contre l’insécurité en général, que les Etats-Unis ont tenu à saluer, en consultant solennellement le chef de l’Etat et en l’assurant de leur soutien. Réjouissons-nous de la prise de conscience des grandes puissances sur leur devoir de solidarité envers notre pays dans cette épreuve. Non, nous ne sommes pas seuls. Oui, nous sommes sur la bonne voie. Tant que nous restons unis.

Commentaires (0)
Seul les utilisateurs enregistrés peuvent écrire un commentaire!

!joomlacomment 4.0 Copyright (C) 2009 Compojoom.com . All rights reserved."



haut de page  
PUBLICITE
Bannière