Des files d’attente pour le carburant dans un pays producteur de l’or noir, c’est la douloureuse expérience vécue tout le mois d’octobre et début novembre par les Tchadiens. Phénomène pour le moins surréaliste dans un pays qui fait partie depuis 2003 du cercle restreint des pays producteurs de pétrole, et qui a engrangé depuis grâce à l’or noir plus de 10 milliards de dollars. Quand le bruit a couru que la raffinerie de Djermaya, située à environ 80 kilomètres de N’Djamena, allait provisoirement cesser son activité pour cause de maintenance des installations, la psychose de la pénurie s’est répandue comme une traînée de poudre. La psychose s’est rapidement concrétisée dans les stations-service avec d’interminables files d’attente. Entre automobilistes et motocyclistes qui pullulent dans la capitale, c’est la foire d’empoigne pour arriver à se ravitailler. Ce qui a ouvert un boulevard aux marchands véreux, professionnels de la spéculation et des surenchères. La douche est froide.  D’où les pénuries artificielles, les hausses vertigineuses des prix des carburants et au final la colère de la population qui a manifesté dans plusieurs villes du pays.

Pourtant les autorités en charge du secteur sont formelles : les stocks de sécurité sont suffisamment pourvus pour couvrir largement les besoins de la population. S’agit-il alors d’une pénurie savamment orchestrée par des mains mafieuses dans le gotha socio-politique ndjamenois. Nombre d’observateurs en sont convaincus. Qu’on en juge ! Les citernes partent de Djermaya gasoil et super confondus, entre 60  et 70 pour approvisionner N’Djamena. Sachant que chacune contient 36 000 litres, on estime avoir suffisamment de quoi répondre à la demande. Problème : si ces citernes quittent effectivement la raffinerie, certaines semblent se volatiliser en chemin, sans qu’il soit possible de déterminer leur nombre et leur propriétaire. Une chose est sûre, c’est  qu’elles ne livrent pas les stations-service. Au mépris de toutes les règles de sécurité. C’est ainsi  que les cas de transvasements  sauvages  et clandestins se multiplient avec tous les risques de tragédie que cela suppose. C’est au cours d’une telle opération qu’un incendie s’est déclaré dans une concession. Le drame a été évité de justesse même si tout le matériel et le chargement sont partis en fumée. Un incident qui illustre les dangers de détournements des produits pétroliers motivés par un seul objectif : la spéculation. Encore une fois, il convient de le souligner, il revient aux autorités compétentes de faire tout leur boulot afin que l’indépendance énergétique du pays ne soit pas biaisée.