« Ce jour n’est pas différent des autres pour moi. Je vais dormir à 22h comme d’habitude. Du moins, je vais essayer. Parce qu’on a un bar pas très loin de la maison qui a déjà placé de gros baffles dehors.
Quant à l’église réveillée voisine, le pasteur a mis une enceinte sonore, aussi haute qu’une porte, dans la cour, à côté de son portrait, tout aussi grand. Ça promet ». Marguerite K., habitante de Ngodi, a bien raison de se lamenter. Parce que ce 24 décembre 2014 n’est en rien semblable au réveillon plutôt calme de l’année dernière dans la capitale économique camerounaise. Première indication avec les feux d’artifice qui retentissaient déjà dès 20h du côté de Bonapriso.
Alors, avant-hier, à quelques minutes des douze coups de minuit du 25 décembre, c’est dans la joie qu’on a attendu la naissance du Petit Jésus. Une joie à mille lieues toutefois de la ferveur religieuse. Même si effectivement, comme chaque année, des fidèles sont passés d’un jour à l’autre dans la prière. Mais leur piété était plutôt noyée dans le vacarme et les effluves d’alcool des lieux de réjouissance à côté. Comme à Nkongmondo ou à la rue de la joie à Deido. Des espaces récréatifs parfois spécialement aménagés pour l’occasion, illustration à Village, sur le chantier de la pénétrante Est. Et si on pensait que le carrefour Nelson Mandela (anciennement "Carrefour j’ai raté ma vie") ferait triste mine au vu des bars démolis pour que passe la route et le développement, surprise a été de constater qu’il n’en était rien. Des individus ayant trouvé le moyen de créer un immense îlot de joie au bord d’une excavation.
Et fait à noter pour ce réveillon de Noël, les lieux les plus saturés étaient les snack-bars. A Deido, Akwa, comme dans la zone universitaire (de la Cité Sic à la Cité Cicam en passant par Ange Raphaël). Avec une clientèle d’une moyenne d’âge à peine dans la vingtaine. Mais, contraste saisissant dans cette zone, autant on pouvait voir des adolescents se baladant avec des bouteilles de bière en main, autant on pouvait observer un groupe de jeunes, en t-shirts blancs, en train de donner des conseils à leurs semblables pour des comportements responsables. Pas sûr que le couple en train de s’amouracher sur le trottoir, devant le Club UV ait compris.
Et à côté des fêtards et des bars, d’autres essayaient de trouver leur compte. Exemple avec ce vendeur de chaussures à Shell New Bell, les salons de coiffure, les échoppes, petites comme grandes, encore ouvertes, un cordonnier à Nkongmondo, et même un studio-photo à la rue de la joie, qui avait d’ailleurs trouvé cliente, très lucide, bien qu’il soit minuit passé. Parlant de lucidité, pas très loin de là, rond-point Deido, une autre jeune femme, endormie et cramponnée au conducteur de moto, n’était plus en pleine possession de ses moyens. Direction, Bonabéri. Y est-elle arrivée ?
