L’Afrique est le continent de la misère et de la pauvreté. C’est vrai. Mais cette réalité masque une autre Afrique, plus nombreuse, plus puissante. L’Afrique qui construit l’avenir et qui est déjà une réalité pour des centaines de millions d’Africains et des Français qui y vivent et y travaillent. Un rapport au ministre français de l’Economie et des Finances, daté de décembre 2013, sous le titre « Un partenariat pour l’avenir », invite la France à prendre la mesure de l’émergence économique et sociale de l’Afrique qui en fera l’un des pôles majeurs de la mondialisation au XXIe siècle.
Les auteurs du document relèvent à juste titre que l’Afrique est le théâtre d’une compétition mondiale croissante où la France perd des parts de marché. A l’appui de leur thèse, des chiffres saisissants : la part de marché de la Chine sur le continent africain est passée de moins de 2% en 1990 à plus de 16% en 2011 ; au-delà des pays européens, de très nombreux pays ont intensifié leurs liens avec l’Afrique, comme l’Inde ou les Etats-Unis, Israël ou l’Iran, et de nouveaux acteurs sont apparus, à l’instar du Brésil, des pays du Golfe, de la Turquie et de la Malaisie ; entre 2000 et 2011, la part de marché de la France au Sud du Sahara a décliné de 10,1% à 4,7%, même si la valeur des exportations françaises y doublait sur la même période. Si l’Afrique attire tant, c’est parce qu’elle est un continent en pleine croissance économique, avec un taux de croissance de 5% par an en moyenne depuis plus d’une décennie, juste derrière l’Asie et loin devant l’Europe. La croissance du PIB africain devrait atteindre 5,6% en 2013 et s’élever à 6,1% en 2014. Même si elle ne représente encore que 2% du commerce mondial, l’Afrique a connu la plus forte croissance dans les échanges internationaux entre 2000 et 2011, avec une croissance des importations au Sud du Sahara de 16% par an en moyenne. L’Afrique est le continent qui épargne le plus après l’Asie ; les réserves de change y sont estimées à 500 milliards de dollars US. La capitalisation boursière a été multipliée par neuf depuis les années 90, et plus de 2000 entreprises sont désormais cotées. La part de l’Afrique dans les investissements directs étrangers (IDE) mondiaux est passée de 1,2% en 2007 à 3,1% en 2012. L’Afrique est même l’une des rares régions à avoir enregistré une hausse des entrées d’IDE en 2011 et 2012, alors que les flux mondiaux baissaient sur la même période. Si la France veut bénéficier de la croissance africaine, recommandent les experts, elle doit s’engager dans la bataille économique en cours, en particulier en Afrique au Sud du Sahara. Le jeu en vaut la chandelle, car plus de 200 000 emplois pourraient être ainsi gagnés en France dans les cinq prochaines années. Pour ce faire, le rapport met l’accent sur la relation d’affaires qu’il invite à mettre au cœur des relations franco-africaines et propose 15 pistes qui visent deux objectifs : mettre en place un nouvel agenda partagé entre la France et l’Afrique, puis remobiliser la France en réinvestissant les leviers d’influence et en relançant la présence économique française en Afrique. La Fondation franco-africaine pour la croissance présentée vendredi dernier à Paris incarne cette nouvelle vision.