A la veille du 11 février, fête de la Jeunesse, Paul Biya a parlé à ses jeunes compatriotes. Comme d’habitude, aurait-on envie de dire. Les fêtes de la Jeunesse se suivent et se ressemblent. Moment de communion, de brassage, de réflexion, autant que de célébration entre jeunes et adultes, elles peuvent néanmoins prendre une coloration particulière, lorsque le contexte de leur commémoration est inhabituel. En ce début d’année, par exemple, l’armée camerounaise continue d’affronter courageusement les hordes enragées de Boko Haram dans l’Extrême-Nord du pays, rejointe depuis peu par le Tchad. L’effort de guerre consenti par le Cameroun depuis huit mois à cet égard vient à coup sûr desservir, et non pas stopper, un redressement économique qui avait commencé à porter des fruits. Pour en rajouter à la spécificité du contexte actuel les jeunes Camerounais constituent depuis peu, au grand étonnement des Camerounais, la cible privilégiée de diverses campagnes médiatiques et cybernétiques destinées à leur saper le moral, en les présentant comme une génération sacrifiée, sans perspectives d’avenir dans une société égocentrique, où les vieux s’accrochent à leurs fonctions et à leurs privilèges. Un appel à peine voilé à l’insurrection.

C’est clair : le message présidentiel aux jeunes du Cameroun et, à travers eux, à tous ses compatriotes, ne pouvait pas être banal dans un environnement si peu ordinaire. Le chef de l’Etat a voulu remettre les jeunes en confiance et les appeler à la vigilance, dans la période critique que traverser le pays. La confiance doit naître de la certitude que l’Etat fait tout pour eux, qu’ils ne sont pas si mal lotis, et que l’avenir est rose. Alors, pour mieux marquer les esprits, le message est court et dense. Il s’ouvre sur la préoccupation de l’heure, l’emploi, et pour couper court à toute tendance au fatalisme ou au défaitisme dans ce domaine, Paul Biya révèle, chiffres à l’appui, que les objectifs de création d’emplois en 2014 ont bien été atteints, et que ceux de 2015 sont encore plus ambitieux. Tout cela dit sans triomphalisme, puisqu’il est clair que l’on peut toujours mieux faire, mais sans fausse modestie non plus, ce bilan étant à bien des égards, enviable.

Comme on pouvait s’y attendre, le président de la République saisit l’occasion de ce message pour évaluer de manière schématique la politique nationale de création d’emplois, et appeler le gouvernement et des milieux d’affaires à des réorientations stratégiques et à plus d’engagement. S’il invite les jeunes à plus de réalisme et de patience, c’est bien pour souligner que le plein emploi n’existe nulle part, et que seuls les efforts conjugués des Camerounais pour atteindre une croissance économique plus forte produiront les résultats les plus significatifs.

Plus qu’un appel à la confiance, l’adresse présidentielle à ses jeunes compatriotes est aussi une exhortation à la vigilance. Un pays jeune, ambitieux et uni est déjà exposé à bien des périls. Lorsqu’il est a fortiori engagé dans un conflit armé pour défendre son intégrité et ses valeurs, il ne peut se préserver que par la cohésion. Pour illustrer l’ardeur au travail et le culte de l’effort, le président Biya a coutume de prendre en exemple les Lions indomptables du football. Fait inédit, il donne ici aux jeunes, un nouveau modèle à admirer et à imiter : les soldats camerounais enrôlés au front. Leur patriotisme à toute épreuve doit faire école et inspirer la jeunesse en quête d’idéal. La confiance en soi et en son pays, et la vigilance, voilà pour les jeunes les boucliers de choix, selon le président Biya, contre les tentatives de déstabilisation et les oiseaux de mauvais augure. Le fighting spirit des soldats qui se battent contre l’ennemi, doit entretenir chez les jeunes la persévérance, l’endurance, la patience, l’espoir, bien plus, l’amour de la patrie. Pour le Cameroun, ils doivent oser faire le pari de la confiance : croire en leur pays et en eux-mêmes, c’est déjà ouvrir les portes de l’avenir.