Ancienne journaliste, la secrétaire générale de l’OIF plaide pour une Francophonie moderne et tournée vers l’avenir.
Depuis la passation de pouvoir avec son prédécesseur Abdou Diouf, le 5 janvier 2015 au siège parisien de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), Michaëlle Jean se coule progressivement dans sa nouvelle fonction de secrétaire générale de cette organisation. Canadienne d'origine haïtienne, elle a été désignée par consensus au poste de secrétaire générale de l'OIF le 30 novembre 2014, lors du 15e Sommet de la Francophonie tenu à Dakar au Sénégal. Une désignation qui fera date dans les annales pour au moins deux raisons. Primo, il s'agit de la première nomination à ce poste d'une personnalité non-africaine. Ce qui a modifié une règle tacite selon laquelle le secrétaire général vient d'un pays du Sud tandis que l'administrateur appartient à un pays du Nord. L’histoire retiendra donc que Michaëlle Jean est la première personnalité issue d’un pays de l’hémisphère Nord à avoir remplacé deux Africains à ce poste créé en 1997, et qui aura été occupé successivement par l’Egyptien Boutros Boutros Ghali et le Sénégalais Abdou Diouf. Et du coup, ceux qui revendiquaient une chasse gardée africaine ont été surpris dans la capitale sénégalaise l’an dernier, les dirigeants du continent ayant consenti à la nomination de Michaëlle Jean après avoir fait le « constat d'une non-candidature unique africaine ». Secundo, Michaëlle Jean est la première femme à accéder à cette prestigieuse fonction. Les observateurs soulignent à cet effet qu’elle avait plusieurs atouts, parmi lesquels son âge et le fait qu’elle soit la seule candidate femme. Née en 1957 à Port-au-Prince, à Haïti, la patronne de l’OIF est cette année âgée de 58 ans. Dans un communiqué publié juste après sa nomination, Michaëlle Jean avait levé un pan de voile sur sa vision : « J'entends répondre aux besoins et aux attentes des Etats et gouvernements membres de l'OIF tout en donnant une nouvelle impulsion à la Francophonie », avait-elle déclaré, plaidant pour une « Francophonie moderne et tournée vers l'avenir ». L’hôte de marque que le Cameroun accueille a également un parcours unique. En effet, c’est en 1968 qu’elle arrive au Canada avec ses parents qui fuient comme des milliers d’autres familles le régime dictatorial de François Duvalier. Elle connaît l’émigration et la douleur du déracinement. Le Québec devient alors sa terre d’accueil. A l’Université de Montréal, elle complète un baccalauréat ès arts en Littérature et langues modernes (italien et espagnol). Tout en enseignant la langue et la littérature italiennes, elle poursuit avec succès des études de maîtrise en Littérature comparée. Polyglotte, Michaëlle Jean parle cinq langues (français, anglais, espagnol, italien et créole haïtien). Epouse du cinéaste, essayiste et philosophe français Jean-Daniel Lafond, mère d'une fille (Marie-Eden) née en Haïti, Michaëlle Jean a aussi eu, de 1988 à 2005, une brillante carrière de journaliste et d’animatrice d’émissions d’information à la télévision publique canadienne, et dans les réseaux de langues anglaise et française CBC/Radio-Canada. Ses réalisations en journalisme lui ont valu de nombreux prix. L’Assemblée parlementaire de la Francophonie souligne son mérite et lui décerne l’insigne de Chevalier de l’Ordre de la Pléiade. L’ancienne présentatrice-vedette de Radio-Canada a également été, du 27 septembre 2005 à octobre 2010, la 27e Gouverneure générale et commandante en chef du Canada. Durant les cinq années de son mandat, elle effectue plus de 40 visites d’Etat et missions officielles à l’étranger. Elle a ensuite été désignée envoyée spéciale de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco) à Haïti. En 2012, Michaëlle Jean accepte la fonction de chancelière de l’Université d’Ottawa, le plus grand campus bilingue en français et en anglais au monde.
