La mission d’Abdoulaye Bathily, nouveau représentant spécial du secrétaire général de l’Organisation des Nations unies (ONU) dans la crise burundaise, ne s’annonce guère aisée. Et pour cause ! Depuis le déclenchement des manifestations de l’opposition et de la société civile contre un troisième mandat du président de la République, Pierre Nkurunziza, à la tête de l’Etat, les lignes n’ont pas fondamentalement bougé.
Beaucoup d’observateurs croyaient que le report des élections législatives et municipales du 5 au 29 juin décrisperait quelque peu l’atmosphère politique du pays. Il n’en est rien. La nouvelle série d’attaques à la grenade perpétrée au nord du Burundi, dans la province du chef de l’Etat et dans la capitale Bujumbura, dans la nuit de dimanche à lundi , s’étant soldée par quatre morts et une trentaine de blessés, montre que non seulement la tension ne faiblit pas mais aussi et surtout, elle persiste. Ces nouveaux morts rappellent notamment l’assassinat de trois manifestants au centre de Bujumbura, il y a quelques semaines, à la suite d’une explosion de grenade ainsi que le meurtre de l’opposant Zedi Ferudi, leader d’un modeste parti politique, de même que son garde de corps, froidement abattus par des individus non identifiés et les victimes de la tentative de coup d’Etat du général Godefroid Niyombaré. La tension qui prévaut dans le pays est si vive que l’organisation Human Rights Watch dénonce l’usage excessif de la violence à l’encontre des manifestants. Certains observateurs internationaux qui convergeaient au Burundi ont dû abandonner. La Commission électorale nationale indépendante (CENI) en est réduite à les rappeler.
Le nouveau médiateur de l’ONU aura besoin de toute son expérience d’ancien député et ministre sénégalais ainsi que celle de médiateur dans plusieurs crises continentales pour dénouer la crise burundaise au moment où le dialogue gouvernement-opposition stagne de nouveau et où des frictions sont signalées avec le Rwanda au sujet de l’entraînement des rebelles burundais dans ce pays voisin. Le gouvernement tient à tout prix à ce que les élections législatives et municipales aient lieu le 29 juin et qu’elles soient suivies par la suite par la présidentielle. Le camp d’en face s’y oppose. L’Union africaine (UA) vient de convier les deux parties à de nouveaux pourparlers pour l’organisation des élections. Le médiateur de l’ONU va certainement amplifier l’impulsion panafricaine. C’est-à-dire relancer rapidement et effectivement le dialogue gouvernement-opposition et faire approuver le calendrier électoral par les deux parties. De peur que le cycle de violences lié aux contestations du troisième mandat de Pierre Nkurunziza ne se perpétue.