Alors qu’on espérait que la réélection de Pierre Nkurunziza pour un troisième mandat à la présidence de la République décrispe le climat politique du pays, on assiste plutôt à la détérioration de ce climat. Le président réélu a pourtant su manœuvrer en faisant élire au poste de premier vice-président de l’Assemblée nationale, le leader de l’opposition, Agathon Rwasa .
Le revirement spectaculaire d’Agathon Rwasa a plutôt radicalisé ses anciens alliés. Toute l’opposition, qui avait boycotté le scrutin présidentiel ,s’est retrouvée, le 1er août dernier, aux côtés des anciens chefs d’Etat burundais et des principaux leaders de la société civile afin de mettre sur pied le Conseil national pour le respect de l’accord d’Arusha et la restauration d’un Etat de droit au Burundi (CNAREC) et en confier la direction à l’opposant historique, Léonard Nyangoma . Les pères- fondateurs du CNAREC lui ont assigné une mission claire et sans équivoque : « Combattre le président Pierre Nkurunziza qui a violé l’accord de paix d’Arusha et la Constitution du Burundi en briguant un troisième mandat. » Rien ne permet d’affirmer que le combat auquel l’opposition fait allusion est lié à lutte armée. On ne peut cependant pas s’empêcher de constater qu’un nouvel attentat est survenu avant-hier, à Bujumbura, la capitale. Le général Adolphe Nshimirimana, chargé de mission auprès du président de la République, a été touché par deux roquettes avant d’être arrosé à l’arme automatique.
Cet attentat n’est naturellement pas passé inaperçu dans les allées du pouvoir. On sait que certains détracteurs du régime ont souvent usé de violence pour contraindre Pierre Nkurunziza à renoncer à son troisième mandat. Sans succès. On sait également que le régime en place a parfois fait montre d’abus d’autorité pour décourager les velléités des opposants. Ce désordre n’a pas empêché Pierre Nkurunziza de conquérir son troisième mandat encore moins à son parti de remporter les élections législatives. Toujours est-il que le nouveau tournant politique burundais est inquiétant. D’autant plus qu’il est marqué du sceau de la radicalisation des positions et par « un acte susceptible de déstabiliser davantage le Burundi». Il est difficile de savoir jusqu’où ira le CNAREC dans son combat contre le président réélu. De même, on ne peut pas prédire comment le gouvernement va assurer le maintien de l’ordre public. C’est donc à dessein que l’Union africaine appelle tous les Burundais à la retenue et à renoncer à tout acte de représailles qui ne ferait que compliquer et aggraver la situation politique.