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« L’Afrique n’a pas pensé son industrialisation»

Désiré AVOM, agrégé, professeur titulaire, doyen à la faculté des Sciences économiques et de Gestion, université de Dschang.


Ce matin votre communication présentait les enjeux de l’industrialisation en Afrique en termes de changements mentaux et sociaux. Comment comprendre cette approche ?

 

Les enjeux sont énormes et s’orientent vers le développement. Ce développement est défini selon François Perroux comme une combinaison de changements mentaux et sociaux d’une population qui la rendent apte à faire croitre son produit net global autrement dit sa richesse. Ainsi, l'industrialisation est une composante essentielle du développement. Il est appréhendé comme un processus long et progressif marqué par plusieurs étapes, se traduisant par des sauts technologiques qualitatif et quantitatif, des modifications en profondeur des modes de vie et de penser. De ce fait, on peut retenir au moins deux grands enjeux. Le premier enjeu est celui de la transformation et la diversification de nos structures économiques pour garantir une croissance économique, soutenue, stable et inclusive, c’est –à-dire une croissance portée et partagée par tous. En effet, la décomposition de la croissance économique en Afrique montre une faible contribution du secteur industriel. Il affecte pourtant positivement les autres secteurs dans d’autres pays. Le deuxième, corollaire au premier, est celui de la création des emplois décents et de la lutte contre la pauvreté. Les statistiques disponibles montrent que les secteurs agricole et de service créent environ 90 pour cent d’emplois contre 10 pour cent dans le secteur industriel. Mais, à l’observation, les emplois créés dans le secteur agricole et des services sont le plus souvent précaires et non qualifiés en raison de leur mauvaise organisation, alors qu’ils sont dans l’industrie plus qualifiés, et stables.

 

Quels sont les différents types d’obstacles liés à cette industrialisation

On peut identifier trois types d’obstacles : la qualité de la gouvernance, le déficit infrastructurel, les vicissitudes de l’environnement international. S’agissant tout d’abord du premier obstacle, il faut reconnaitre que, malgré les importants progrès enregistrés ces dernières années, et bien que cela ne soit pas une spécificité africaine, la question de la gouvernance demeure une préoccupation en Afrique. En effet, la mauvaise qualité des institutions ralentit l’avènement d’une bonne gouvernance, se traduisant par un mauvais climat des affaires, des politiques économiques inappropriées sur les questions stratégiques comme les politiques sectorielles, les choix de spécialisation en rapport avec l’évolution de la demande des biens et services mondiaux ou de la chaine des valeurs, la politique de change, etc…  S’agissant ensuite du déficit infrastructurel, l’Afrique accuse un très grand retard dans le développement des infrastructures préalable à son industrialisation notamment dans les secteurs de l’eau, l’énergie, l’éduction, etc. A titre d’illustration, le déficit en ingénieurs nécessaire pour accompagner l’industrialisation est estimé à près de 2,5 millions. Plus spécifiquement en Europe, on compte 20 à 50 ingénieurs pour 10000 habitants contre 1 à 5 pour la même proportion en Afrique. Pourtant, le continent forme des ingénieurs, des médecins, etc. qui pour plusieurs raisons préfèrent travailler dans le reste du monde. De plus le continent dispose des ressources importantes non exploitées en eau et en énergie. S’agissant enfin du dernier obstacle, la question de l’industrialisation africaine intervient désormais dans un contexte fortement contraint par l’obligation du respect des normes internationales notamment en matière environnementale. La 21e Conférence des parties (COP21) de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, qui se tient à Paris du 30 novembre au 11 décembre, regroupera 195 pays, devrait aboutir à un accord international sur le climat, applicable à tous les Etats dans l’objectif de maintenir le réchauffement en deçà de 2°C. Les conséquences sur l’environnement étant, au-delà de cette limite, jugées potentiellement catastrophiques.

 

Pourquoi les modèles économiques expérimentés en Afrique échouent-ils systématiquement depuis 50 ans, l’Afrique demeure le continent le moins industrialisé ?

 

Oui l’Afrique malheureusement demeure le continent le moins industrialisé du monde. Tous les indicateurs semblent bien le montrer. La tendance générale malgré les trajectoires spécifiques de certains pays est même à la baisse. Par exemple la part des industries de transformation dans le PIB est passée de 9,4 pour cent en 1960 à 8,5 en 2000. En effet, au-delà des idéologiques qui ont influencées les stratégiques d’industrialisation depuis les indépendances, les orientant vers la mise en valeur des dotations naturelles pour répondre aux besoins des économies européennes, l’Afrique n’a pas pensé son développement et par conséquent son industrialisation. La crise des années 1970, conséquence de la baisse des prix des matières premières, aurait pu servir de prétexte à la réorientation ou du moins à la définition de la politique industrielle. L’Afrique a plutôt subi les plans d’ajustement structurels imposés par les bailleurs de fonds. Cela a malheureusement contribué au démentielle ment de ce qui tenait lieu de tissu industriel remettant en cause l’idée d’industrie dans l’enfance développée par l’économiste allemand Frederick List.

 



 

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