La décision de la communauté internationale de soutenir la Libye à travers la création d’un fonds de stabilisation vient à point nommé. Surtout que le fonds appuyé par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) a pour but de soutenir le nouveau gouvernement d’union nationale dans la mise en œuvre de ses priorités, notamment la réhabilitation des infrastructures et l’amélioration des prestations de base.
L’engouement suscité par le fonds de stabilisation est remarquable. C’est ainsi que l’Allemagne a promis dix millions d’euros pour une période de deux ans. Les Etats-Unis accordent deux millions de dollars pour la première année, l’Italie deux millions d’euros, le Royaume-Uni un million de dollars, le Qatar deux millions de dollars, la Norvège un million de dollars, la Suisse 250.000 dollars. L’Union européenne, la République de Corée, le Canada, la Russie et les Pays-Bas ont promis d’apporter un appui total à la Libye. Si ce soutien matériel et financier participe de la reconstruction de la Libye, il y a lieu de reconnaître qu’il ne saurait suffire pour sortir la Libye du chaos.
La reconstruction physique et matérielle est capitale parce qu’elle permet de résoudre des problèmes concrets notamment la réhabilitation des hôpitaux, des installations d’eau, des réseaux électriques, des postes de police. Elle ne saurait cependant remplacer la reconstruction morale à savoir la réconciliation nationale. Aussi curieux que cela puisse paraître, pendant que la communauté internationale est fermement penchée au chevet de la Libye pour l’aider à se relever et faire face à la menace terroriste, incarnée par l’Etat islamique(EI), les Libyens eux-mêmes ne semblent pas s’en émouvoir outre mesure. La preuve en est que le gouvernement d’union nationale pourtant issu d’un accord signé en décembre 2015 continue d’élire domicile dans une base navale à Tripoli depuis l’arrivée de ses membres à Tripoli le 30 mars dernier. Il n’est pas superflu de noter que le Premier ministre, Fayez al-Sarraj et les membres de son gouvernement ont été froidement accueillis par les membres du parlement et du gouvernement hostiles de Tripoli ainsi que des milices réfractaires. L’opposition des anciennes autorités de Tripoli au gouvernement d’union nationale était d’autant plus angoissante qu’elles contrôlaient la capitale depuis 2014 après en avoir chassé le parlement et le gouvernement naguère reconnus par la communauté internationale qui s’étaient résolus de prendre leurs quartiers à Tobrouk à l’est du pays. Heureusement pour le gouvernement d’union nationale, les anciennes autorités de Tripoli sont revenues à de meilleurs sentiments puisqu’elles ont accepté de s’effacer pour éviter que la Libye continue de s’embourber dans la crise. Il reste maintenant que les institutions de Tobrouk accordent leur confiance au gouvernement d’union nationale. A priori, rien ne dit que le vote de confiance du parlement de Tobrouk au nouvel exécutif libyen, ce 18 avril, est acquis. Cependant, on peut croire que sur la base de la logique utilisée par les anciennes autorités de Tripoli, ce parlement peut accorder sa confiance aux nouvelles autorités et s’effacer pour permettre au gouvernement d’union nationale de continuer sa mission.
Tiraillée entre les milices rivales depuis la chute de l’ancien guide libyen, Mouammar Kadhafi, en 2011, la Libye n’a jamais véritablement connu la paix. Ni le Conseil national de transition, ni le Congrès général national n’ont pu stabiliser le pays. Encore moins les bandes armées souvent promptes à s’accaparer des ressources pétrolières. Le défi qui interpelle le gouvernement de Fayez al Sarraj est donc immense. Il s’agit de réconcilier les Libyens et reconstruire le pays pour sortir du chaos.