La vie tumultueuse de cette femme, objet de toutes les expériences humiliantes, est au cœur d’une pièce de Martin Ambara.
Une pièce difficile et tourmentée. Parler de Sawtche Baartman, celle que certains ont baptisé la Venus hottentote, est un exercice complexe. Le metteur en scène, Martin Ambara tente l’exercice avec sa pièce « Sawtche Baartman », jouée au Laboratoire de théâtre OTHNI à Yaoundé, les 11, 19, 20 et 21 mai derniers. Loin de l’approche polémique et sulfureuse du réalisateur français Abdellatif Kechiche, présentée en 2009 dans son film « Vénus noire », le metteur en scène camerounais s’apaise sur le côté humain de cette femme au destin troublé. Les comédiennes Hermine Yollo, Armelle Etongo, Doris Meli et Alima Pelagie, dans une chorégraphie signée Bertrand Yakana, ressortent avec philosophie et prose les malheurs de Sawtche Baartman, baladée de ville en ville dans l’Europe du début du 19e siècle comme une bête de foire. Les sentiments blessés d’une femme humiliée aux yeux de tous, au prétexte de la science et du divertissement.
Née dans une tribu d’éleveurs en Afrique du Sud, elle est enlevée à sa famille et se retrouve en Europe. Gardée en cage pendant plusieurs années, au cœur de la capitale britannique, les gens se pressent pour dévisager « la bête curieuse ». Cabarets douteux, bordels ignobles sont les points de passage de la jeune femme que tous s’amusent à regarder. Elle est vendue à un escroc du spectacle, qui la livre à un montreur d’animaux. Puis Sawtche rejoint, contrainte et forcée, la France pour animer les salons de libertinage de la capitale. Les formes généreuses de la jeune femme intriguent autant qu’ils effraient, fascinent les scientifiques qui en font l’objet de leurs recherches sur l’évolution. Elle est triturée, analysée, auscultée, tâtée et malmenée. Un traitement que la pièce de Martin Ambara vient réveiller comme pour s’ériger à sa manière contre les traitements subis par cette femme, et que d’autres femmes subissent et continueront de subir.
